Le rêve lucide.2.


Sommaire :
1. Améliorer la qualité perceptive des rêves.
2.Repérer les rêves associés
3. Induire le rêve lucide par le rêve associé ou éveillés (Les méthodes LORA et LOREL)
4. Annexe : sur quelques rêves de vol


AMÉLIORER LA QUALITÉ PERCEPTIVE DES REVES

Avec la première leçon, vous vous êtes entraîné à augmenter la quantité de vos récits de rêves. La notation quotidienne dčun ou deux rêves, au moins, doit être désormais un réflexe. En effet, cette rédaction régulière, même si elle ne concerne que des fragments oniriques, entraîne à son tour le développement du rappel des rêves. Et le souvenir des rêves est une condition indispensable (et même parfois suffisante) au souvenir de lčémergence de la lucidité : si vous vous exercez au rêve lucide sans avoir développé votre capacité de rappel des rêves, vous obtiendrez probablement des résultats, mais vous nčen saurez rien.
Nous allons voir maintenant comment améliorer la qualité des rêves. Cette amélioration peut se comprendre de deux façons :
1) elle peut porter sur le contenu du rêve lui-même, cčest-à-dire aussi bien sur ce qui est perçu au cours du rêve que sur le déroulement de lčhistoire onirique ;
2) elle peut aussi concerner le rêveur qui devient alors capable de remarquer les nuances oniriques qui lui permettront de devenir lucide.
Dans le premier cas on sčintéresse au rêve lui-même pour en augmenter lčintensité. Dans le deuxième on apprend à mieux connaître ses rêves, à déceler les rêves associés au rêve lucide et à en utiliser le souvenir pour mieux interagir avec son propre univers onirique. Cette démarche est un moyen sûr de provoquer la lucidité ou dčen augmenter la fréquence. Mais pour mieux apprécier les nuances des rêves, il est judicieux dčen avoir, en plus dčun bon rappel, une perception aiguisée, ce qui, dans ce domaine, équivaut à une meilleure qualité de ce qui est perçu et vécu. En bref, il faut obtenir des rêves de qualité.

I. DES RÊVES DE QUALITɊ
Lčidée même dčaméliorer la qualité des rêves pourra paraître étrange à certains. En réalité, pour ce qui est des qualité perçues (couleur, luminosité) il est difficile de déterminer si les méthodes décrites plus loin agissent sur le rêve ou plus simplement sur la qualité de la remémoration, même si, du point de vue du contenu, certaines modifications sont indéniables. Par ailleurs, des différences de qualité ont déjà été mises en rapport avec les phases du cycle de sommeil. Examinons-les rapidement.

A. QUALITÉ ONIRIQUE ET RYTHMES DE SOMMEIL
Au réveil, les rêves ne se présentent pas tous au souvenir avec la même clarté. Si certains rêves sont parfaitement nets, colorés, riches en détails de toutes sortes, dčautres sont flous et difficiles à appréhender ou dčune maigreur à faire peur ; aussi trouverez-vous probablement dans votre journal de rêves des différences de taille (au sens propre) semblables à lčextrait du journal de rêve cité ci-après. (Note pour les lecteurs pressés : les rêves qui suivent ne présente pas dčintérêt particulier. Il ont été sélectionnés en fonction de deux critères : 1) leur différence de longueur et 2) le fait qučils se sont présentés au cours dčune même nuit de sommeil. Leur lecture nčest pas nécessaire pour la bonne compréhension de la suite de ce cours — une simple appréciation visuelle suffit).

Rêve 1 :
Jčai avec moi plusieurs paquets. Certains contiennent des livres, dčautres des objets plus solides tels que des bouteilles renfermant peut-être du parfum ; car il me semble que lčune dčelles sčest cassée dans un des sacs. Ceux-ci se présentent comme de grands sacs en plastique blancs. Au départ jčai voulu faire plusieurs voyages par le métro et jčai laissé quelques sacs dans une station. Mais maintenant que je suis dans une rame, je me rends compte que je ne les retrouverai pas. Je mčaperçois que la rame entre dans une station que je ne connais pas. Je demande à quelqučun comment sčappelle la station qui précède. On me donne le nom de la suivante, ou on ne répond pas correctement à ma question. Jčinsiste, car ce que je veux savoir nčest pas tant le nom des stations que le nombre de celles dépassées à partir dčune station dont je connais le nom. Ce sont des noms qui se terminent en o, comme des noms étrangers. Jčapprends que celle où nous arrivons comporte un changement.
Je descends, et — est-ce parce que je nčai pas dčhabits sur moi ?— jčéprouve le besoin dčenfiler des vêtements. Or, dans un café, je vois, sur une banquette ou une table, des vêtements qui ont été laissés là par quelqučun. Je les mets. Mais persistera le désir, une fois que jčen aurai trouvé dčautres, dčaller les rapporter, car celui qui les a posés là pourrait en avoir besoin.
Jčentre dans une maison où je rencontre un couple aux cheveux blancs qui vient de Virginie. Ils comparent la Virginie, où lčon compte des millions de personnes et où certains procédés sont ouvertement employés pour diminuer la population, avec lčendroit présent où cette tendance nčest pas explicite mais où le problème se pose de façon encore plus flagrante. Tout cela est lié à lčalimentation ? Je regarde le mur sur lequel se dessine une rue avec des magasins, dont une boucherie. Le boucher est mort dčun cancer, et je vois que cčest dû à la graisse utilisée pour faire cuire la viande.
Je mčassois à une table, ou jčy suis déjà assis. Je porte le pull-over vert à col roulé (que je laisse dans la maison de vacances). Papa sčapproche. A ce moment je veux enfiler mon pull bleu foncé à décorations vertes et le maintenir au niveau de ma tête pour que Papa ne me voie pas. Mais je me dis que cčest idiot et je dégage ma tête. Persiste le sentiment que je dois rendre les vêtements que jčai empruntés.
Je discute avec papa. Il savait que jčétais là ?
(Sujet n°16, 1er février 1990, premier réveil, au cours de la nuit)

Rêve 2 :
Quelque chose avec Daredevil et les yeux vairons.
(Sujet n°16, 1er février 1990, deuxième réveil, 8h00)

Cet extrait de journal de rêve présente deux rêves au contenu neutre. On remarque immédiatement que le premier rêve est long et détaillé tandis que le deuxième se réduit à une impression relativement pauvre (ł quelque chose avecŠ Č). Si ces rêves étaient présentés séparément, on pourrait croire que le second est une impression onirique du milieu de nuit tandis que le premier serait un rêve typique de fin de sommeil. En réalité, la situation est inverse du point de vue chronologique, ce que montrent les indications données entre parenthèses sur les premier et deuxième réveils.
Pourquoi une telle différence de qualité onirique alors qučil est de notoriété publique que les rêves sont plus fournis à la fin dčune nuit de sommeil qučau milieu ?
La réponse est à chercher du côté des rythmes cérébraux. A moins de sčentraîner constamment à capter tout ce qui vient du monde du sommeil, le rêveur semble bien dépendre, pour la remémoration des rêves, de certains rythmes du cerveau, ceux qui se produisent au cours du sommeil paradoxal, lequel se situe, on sčen souviendra, dans les cycles nocturne tardifs, mais aussi à la fin de chaque cycle, sa durée augmentant en cours de nuit. Or le sujet cité note dans son journal pour le deuxième récit : ł plus [absence] de souvenirs, peut-être parce que réveillé trop tôt Č, cčest-à-dire trop tôt par rapport au cycle complet. La différence entre les rêves ł vagues Č et les rêves ł précis Č tiendrait donc à ce que les premiers se situent dans la période de sommeil lent tandis que les seconds appartiendraient au sommeil paradoxal.
Ce point de vue est soutenu par Ann Faraday dans son livre Dream Power. Elle distingue les ł rêves REM Č (Rapid Eye Movements, cčest-à-dire ł mouvements oculaires rapides Č, ce qui, dans la pratique, équivaut au sommeil paradoxal) des ł rêves NREM (Non REM, ou sommeil lent). Elle a en effet constaté que le contenu des récits de rêves obtenus en réveillant un sujet au cours dčune période NREM est suffisamment onirique pour être reconnu en tant que rêve, sans pour autant présenter les qualités qui sont celles des rêves obtenus lorsqučon réveille le même sujet au cours dčune période REM. Ce qui lčamène à énoncer comme règle générale que ł les rêves NREM sont plus courts, moins vivant, moins visuels, moins dramatiques, moins élaborés, moins émotionnels, moins actifs, moins plausibles, plus en rapport avec les problèmes courants, plus purement conversationnels, plus proches des pensées que les rêves REM Č, ce que confirment les expérimentations auxquelles elle sčest livrée en laboratoire.

B. QUALITÉ ONIRIQUE ET LUCIDITÉ ONIRIQUE
Cette distinction sčavère bien réelle pour les rêveurs que lčon peut, faute de terme approprié, qualifier dčł ordinaires Č. Toutefois elle ne doit pas nous masquer un autre phénomène qui va se révéler pour nous plus important. Au effet, au sein même des rêves REM, on peut constater des différences de qualité dans les couleurs, les détails, lčintensité, etc. Par exemple certains auront, en fin de nuit de longs rêves en noir et blanc ou même passeront tout un rêve assis dans une voiture, dans lčobscurité, à attendre au feu rouge ; alors qučau cours dčune autre nuit, le décor se parera de couleurs éclatantes pendant que des événements dramatiques jetteront le rêveur dans une action trépidante.
La qualité du rêve peut se modifier dans le courant dčun même rêve, ce qui rend le phénomène plus saisissant encore et montre bien son indépendance par rapport aux changements de phases dans un cycle de sommeil. En voici un exemple classique emprunté à Oliver Fox, dans son livre Astral Projection :

Rêve 3 :
Je rêvai que jčétais debout sur la chaussée, devant chez moi. Le soleil se levait derrière le Mur Romain. et les eaux de la baie de Bletchingden scintillaient dans la lumière matinale. Jčapercevais les grands arbres, au tournant de la route, et le sommet de la vieille tour grise, au-delà des quarante Marches. Dans lčéclairage magique des premiers rayons, même à ce moment du rêve, le paysage, déjà, était fort beau. Il faut noter que le pavage de cette route nčest pas commun. Il est fait de petites pierres rectangulaires, dčun bleu gris, dont les côtés les plus longs sont perpendiculaires au trottoir. Jčallais rentrer à la maison quand, jetant à terre un coup dčŠil distrait, mon attention, soudain, fut arrêtée par un phénomène des plus étranges, tellement extraordinaire que je nčen croyais pas mes yeux. Tous ces pavés avaient dû changer de position pendant la nuit, car leurs plus grands côtés étaient maintenant parallèles au rebord du trottoir ! Lčexplication de cette bizarrerie mčapparut tout à coup : bien que cette magnifique matinée dčété fut on ne peut plus réelle à mes yeux, jčétais en train de rêver.
Lorsque jčeus compris cela, il se produisit, dans la qualité même du rêve, un changement qučil mčest très difficile dčexpliquer à ceux qui nčont jamais eu dčexpérience semblable. En un instant, la vivacité de lčexistence sčaccrut au centuple. Jamais une telle splendeur nčavait éclairé la mer, le ciel et les arbres ; les maisons les plus banales semblaient rayonner dčune beauté quasi mystique. Jamais je nčavais été aussi totalement à mon aise, jamais je nčavais eu lčesprit aussi clair, ni éprouvé un tel sentiment de puissance divine, dčinexprimable liberté ! Les mots ne peuvent décrire une sensation aussi exquise. Cela ne dura que quelques instants, puis je mčéveillai.

Comme vous pouvez le constater à la lecture de ce récit, le rêve de Fox est déjà, à son début, à la fois un rêve détaillé et présentant une certaine qualité esthétique (ł Dans lčéclairage magique des premiers rayons, même à ce moment du rêve, le paysage, déjà, était fort beau Č) . Il nčen reste pas moins que le changement qualitatif est ressenti comme dramatiquement différent : ł En un instant, la vivacité de lčexistence sčaccrut au centuple. Jamais une telle splendeur nčavait éclairé la mer, le ciel et les arbres ; les maisons les plus banales semblaient rayonner dčune beauté quasi mystique Č.
Or, à quoi est dû ce changement qualitatif ? A la prise de conscience qučil sčagit dčun rêve, en dčautres termes à la lucidité onirique : ł Lorsque jčeus compris [que jčétais en train de rêver], il se produisit, dans la qualité même du rêve, un changementŠ Č. Les constatations de ce genre sont fréquentes chez les rêveurs lucides, même sčil ne sčagit pas dčune règle absolue.
Par ailleurs ce qui se produit dans un sens peut se produire dans lčautre. En effet, si la lucidité intensifie souvent la qualité perceptive du rêve, lčinverse est également vrai : un rêve de qualité peut provoquer la lucidité.

Rêve 4 :
Jčai lčimpression qučaussitôt rendormi je me mets à rêver. Je faisais cours au lycée et certains élèves étaient absents, à leur place il y avait des portraits dčeux. Portraits vivants très colorés, beaux et somptueux lčun dčeux était rouge ; un vert, le troisième jaune, et jčai oublié la couleur du quatrième. La couleur était très vivante : mouvante avec des effets de profondeur et dčombre (un peu les mouvements des nageoires colorées des poissons exotiques), les portraits étaient en camaïeu, un peu abstraits, mais très vivants et très réels. Je me suis dit alors que je devais être en train de rêver, jčai fait le geste qui lča confirmé et je me suis réveillé. Ce sont les plus belles peintures que jčaie jamais vues.
(sujet n°1, 1er avril 1985, Portraits)

La beauté intense dčun décor peut donc provoquer la lucidité, sans doute parce qučelle suppose une qualité perceptive qui nčappartient qučau rêve. Dans la pratique cela signifie que si vos rêves deviennent plus clairs, plus lumineux, plus beaux, bref sčils sčapprochent dčune qualité qui vous arrache des larmes de joie - ou presque -, vous saurez que vous la lucidité est nčest plus très loin. La qualité des rêves doit donc être consignée dans votre journal de rêves comme un indicateur de vos progrès. Par ailleurs ces mêmes rêves pourront - devront - être utilisés lors de certains exercices mentaux que nous verrons plus loin.
Mais comment sčy prendre pour augmenter la qualité des rêves ? Cčest ce que nous allons examiner maintenant.

II. DE LA LUMIÈRE AU CERVEAU ET DU CERVEAU AU REVE
Lčamélioration de la qualité perceptive des rêves apparaîtra comme un phénomène moins mystérieux si nous nous penchons sur les circonstances particulières de leur manifestation. Si lčon excepte le cas de lčassociation avec la lucidité onirique, que nous venons dčexaminer, des témoignages permettent dčinsérer les rêves «de qualité» dans des contextes que certains reconnaîtront : ainsi, sčendormir après avoir regardé la lumière du soleil jouer sur lčeau ou avoir admiré un paysage neigeux fortement éclairé entraîne provoque des rêves plus lumineux et plus intenses que ceux obtenus habituellement. A quoi cela tient-il ? Simplement à une certaine qualité de lčéclairage qui provoque une excitation cérébrale améliorant la qualité du rêve. Ce processus a été décrit par Francis Lefébure, médecin français mort en 1988, et auteur dčun livre dont nous vous recommandons la lecture en complément de cette leçon : Le Mixage phosphénique en pédagogie (éditions Phosphénisme, 3 rue de la Chapelle, 75018 PARIS). Nous ne nous intéresserons pas ici à lčaspect pédagogique, mais aux retombées de la méthode phosphénique sur le rêve qui sont décrites dans le chapitre 6 de lčouvrage.
En deux mots, la méthode phosphénique consiste à fixer une source lumineuse dans des conditions suffisamment favorables pour obtenir une réaction cérébrale susceptible de stimuler le cerveau. Nous allons en décrire les différents éléments, mais auparavant une mise en garde sčavère nécessaire.
La méthode phosphénique, comme tout ce qui est rapidement efficace, présente des dangers. Ces dangers ne sont pas inhérents à la méthode mais à sa mauvaise utilisation. Si vous nčavez pas le temps de vous informer correctement, nous vous déconseillons formellement sa pratique. Par ailleurs, si vous souhaitez prendre lčavis de votre médecin (ou de votre ophtalmologiste) assurez-vous qučil connaît le travail de son confrère, et même qučil le connaît réellement (par exemple qučil a lu le livre de Lefébure) et sait de quoi vous parlez. Car, a priori, la fixation dčune source lumineuse nčest pas une pratique courante ! Vous éviterez ainsi à votre médecin deux écueils :
- Donner son avis sur des travaux qučil ne connaît pas ou sur lesquels il nčest pas compétent. Ce phénomène est moins rare qučil nčy paraît, puisqučon trouve normal de demander aux membres du corps médical de se prononcer sur des questions dčéthique. Quant on connaît les moeurs des étudiants en médecine, on a de quoi être étonnéŠ
- Vous conseiller sur la base de préjugés. Votre médecin aura peut-être entendu parler de Lefébure, mais cela ne le qualifiera pas pour porter un jugement. Pour prendre un exemple personnel, jčai cru pendant des années que les théories de Lefébure étaient incohérentes simplement parce que je lčavais entendu dire de la part de gens éminents. Sept ans plus tard, le hasard mča mis entre les mains Le Mixage Phosphénique en Pédagogie et ce nčest qučà ce moment que je me suis rendu compte que Lefébure avait répondu par avance aux critiques qui avaient été formulées devant moi. Et lorsque jčen ai proposé lčexpérimentation à mes étudiants, il sčest avéré que la méthode augmentait bel et bien leurs capacités dčapprentissages et améliorait leurs résultats universitaires !

Pour résumer, lčauteur du présent texte décline toute responsabilité quant aux conséquences de lčutilisation de la méthode phosphénique et met le lecteur en garde contre trois erreurs de pratique :
- une information insuffisante par manque de lecture des travaux de Lefébure,
- une mauvaise utilisation de la méthode phosphénique par non respect des précautions indiquées dans lčouvrage de Lefébure,
- la négligence à prendre conseil auprès dčun spécialiste compétent en matière de santé.
Ces préliminaires une fois admis, voyons en quoi consiste le mixage phosphénique.

A. QUčEST-CE QUčUN PHOSPHÈNE ?
Sans doute vous est-il déjà arrivé de regarder trop fixement un feu, voire la flamme dčune bougie, ou plus simplement le reflet du soleil sur lčeau, puis de fermer les yeux. Il en résulte une tache colorée que vous pouvez observer dans lčobscurité alors même que la source de lumière a disparu. Cette tache lumineuse a reçu le nom de ł post-image Č ou de ł phosphène Č. A noter que les points et filaments lumineux que lčon peut observer yeux ouverts dans une chambre plongée dans le noir, ou yeux fermés derrière ses paupières closes, sans avoir fixé aucun éclairage, et qui ont reçu le nom de ł chaos visuel Č, appartiennent aussi à la catégorie des phosphènes.
ł Les phosphènes Č écrit le docteur Lefébure ł sont toutes les sensations lumineuses subjectives, cčest-à-dire toutes les sensations lumineuses qui ne sont pas DIRECTEMENT produites par un rayon électro-magnétique de longueur dčonde de la lumière Č. Il existe plusieurs causes à la formation des phosphènes, dont certaines doivent être absolument exclues de la pratique, comme la compression des globes oculaires, les drogues hallucinogènes, les coulants électriques trans-temporaux, lčexcitation électrique ou mécanique du lobe occipital, chacune présentant des inconvénients sur lesquels il nčest guère besoin de sčétendre !
La post-image utilisée dans la méthode de Lefébure est, plus précisément, le post-phosphène, cčest-à-dire ł lčimage lumineuse de multiples couleurs qui persiste pendant trois minutes après la fixation dčune source lumineuse de 75 watts au moins à environ un mètre, pendant trente seconde Č. Si lčampoule présente une luminosité blanche, le phosphène obtenu passera successivement par des phases grise, jaune ou verte, rouge, bleue et enfin par une phase de lueur diffuse laiteuse. Ces couleurs, qui ne sont pas celles de lčampoule, sont produites par la réaction dčune certaine zone du cerveau (le cortex occipital) à lčexcitation lumineuse.
Il est somme toute facile dčobtenir des phosphènes lorsqučon sčéclaire à lčélectricité. Dčun point de vue pratique il est plus confortable dčutiliser une lampe à réflecteur dont lčintérieur présente un granité obtenu par électrolyse (on en trouve à la FNAC), muni dčune ampoule blanche dčagrandisseur de photographie. (Attention ! Nčutilisez en aucun cas de lampes à ultra-violet, à infra-rouge ou de tubes luminescents appelés aussi ł néon Č. De plus, sachez que le glaucome est un cas de contre-indication partielle). Il faut ensuite fixer la lampe allumée, sans lunettes ni verres de contact, en cillant régulièrement pendant environ trente seconde, puis faire lčobscurité pendant environ 5 minutes, au besoin à lčaide dčun bandeau oculaire. Le sujet se place à une distance variant entre 1,5 et 3 mètres pour une ampoule de 75 à 100 watts.
A chacun dčexpérimenter ce qui lui convient au début, sachant que la sensibilité à la lumière diminue avec la pratique (ou, en dčautres termes, que la résistance à lčéblouissement augmente). Ajoutons que, en ce qui concerne le travail sur les rêves, chaque séance devrait durer au minimum trois quarts dčheure, ce qui correspond à un cycle cérébral. Par ailleurs, le premier mois, il ne faut pas manquer une seule séance journalière si lčon veut que de nouvelles voies neurologiques se mettent en place dans le cerveau. Le nombre de séances peut être augmenté sans inconvénient. Il est même recommandé de multiplier les séances si vous avez des loisirs suffisants.
Mais former un phosphène ne suffit pas à rendre lčopération profitable dans le champ mental. A cet effet, le phosphène doit faire lčobjet dčun ł mixage Č.

B. LE MIXAGE
Le mixage phosphénique consiste à associer une image mentale au phosphène. Pour cela il faut bien entendu 1) former le phosphène et 2) mettre lčimage mentale dedans, la ł mélanger Č en quelque sorte avec les taches colorées qui se succèdent dans le champ visuel. Lčimage mentale choisie est souvent visuelle ou auditive, mais elle peut aussi bien être tactile, gustative ou même kinesthésique. Il est en effet possible non seulement de se ł représenter Č un mouvement ou une contraction musculaire, cčest-à-dire de les sentir en imagination tout en restant détendu physiquement, mais aussi de placer à une certaine distance (cčest-à-dire dans le phosphène) ces sensations imaginaire. Une telle possibilité peut surprendre puisqučelle ne correspond pas au principe même de ce genre de sensation. Lčentraînement permet pourtant de les obtenir assez facilement. (Notons au passage que la méthode dčinduction au rêve lucide présentée dans le numéro 1 de REVER, 1er trim. 1997, p.54-55, est basée sur ce type de sensations).
Le mixage, ou mélange, peut se faire simplement en gardant à lčesprit une image mentale précise pendant la présence du phosphène. Cčest ce que Lefébure appelle ł mixage dans le temps Č. Mais le mixage peut se faire aussi de façon plus précise, en localisant lčimage mentale visuelle ou auditive à lčintérieur du phosphène, ce qui est une façon dčopérer plus efficace, mais aussi plus difficile, du moins au début.
La méthode exposée dans le livre de Lefébure étant abordée sous lčangle pédagogique, les images mentales choisies par lui appartiennent au registre des leçons que des écoliers doivent apprendre ou que des étudiants doivent assimiler en vue dčun concours. Mais en ce qui nous concerne, cčest le souvenir des rêves que nous mettrons dans le phosphène.

C. REVES ET PHOSPHÈNES
Les phosphènes peuvent être utilisés principalement de deux façons pour améliorer la qualité perceptive ou conscientielle des rêves. La première nčimplique pas obligatoirement le mixage des rêves mais impose une contrainte temporelle. La deuxième, en revanche, nčimplique pas ce type de contrainte mais suppose de mixer dans les phosphènes une sélection de rêves tirées de votre journal.
1. Le mixage à lčendormissement
Plus précisément ce mixage peut avoir lieu juste avant dčaller se coucher ou, mieux encore, pendant lčendormissement - mais ce dernier cas suppose que lčon ait installé une lampe au-dessus de la tête du lit, ce qui peut se révéler malaisé. Dans lčun ou lčautre cas, cette pratique régulière produit un certain nombre dčeffets :
1) Elle fait émerger des rêves beaucoup plus lumineux et aux coloris variés.
2) Les images oniriques sont plus grandes. Lefébure observe que ł si lčon rêve dčune montagne, elle est plus haute qučon nčen a jamais vue ; dčune étendue dčeau, elle dégage un sentiment dčinfini supérieur à la réalité ; dčun troupeau de moutons, ce sera celui qui présentera le plus de têtes dčanimaux qučon aura jamais vu. Mais chacun dčeux sera de taille normale, car cet agrandissement de lčimage, qui a un très bel effet émotif et esthétique, en général ne tombe pas dans lčabsurde Č.
Lefébure précise ł en général Č, et il convient de donner à ces deux petits mots toute leur portée pour ne pas se laisser dérouter par certains phénomènes oniriques de gigantisme qui risquent de se produire. Personnellement, lors dčune période où jčai pratiqué le phosphénisme à lčendormissement, jčai bien eu des rêves plus colorés, dans des étendues plus vaste, donc «normalement» agrandies, mais jčai également rêvé de géants et dčobjets gigantesques, telle ma baignoire remplie qui sčétait élargie aux dimensions dčun océan, à tel point que jčai dû grimper dans le porte-savon, qui avait désormais la taille dčune barque, pour naviguer vers le bord perdu de vue. Donc, attention aux noyades dans un verre dčeau !
3) La conscience de lčenvironnement onirique sčintensifie, tout a lčair plus net, plus ł vrai Č, ce qui signifie que les perception sont à la fois plus intense et plus nuancées.
4) Corrélativement, certains exercices phosphéniques particuliers favorisent le développement de ce que ce Lefébure appelle ł éveil dans le sommeil Č et qui correspond à peu près à ce que nous nommons ł lucidité onirique Č : ł Parfois, la pratique du phosphénisme en sčendormant provoque des états au cours desquels on se perçoit comme réveillé dans le rêve, cčest-à-dire que lčon sait parfaitement que lčon rêve. Lčon possède toute sa lucidité de lčétat de veille Č.
Lčexercice spécifique le plus intéressant pour nous est sans doute la concentration sur un détail du post-phosphène, que Lefébure décrit ainsi : ł On formera un phosphène par une fixation un peu plus prolongée de la lampe que normalement, par exemple une minute. [Š] Ensuite lčexpérimentateur portera intensément son attention vers le centre du phosphène. Il observera que celui-ci nčest pas uniforme : on y note [Š] lčexistence de globules bien reconnaissables à ce qučils sont peu mobiles, avec un centre clair, la périphérie étant formée de deux cercles concentriques plus obscurs. [Š] On y voit aussi des ombres mouvantes, taches dčun marron foncé aux bords dégradés, avec des angles. [Š] On choisit un détail, de préférence un globule ou lčangle dčune ombre mouvante. On portera toute son attention sur lui. En général, il disparaît rapidement : on reportera alors son attention immédiatement sur un autre détail, toujours aussi petit que possible dans la région où il a disparu, et ainsi de suite Č.
Quel en sera lčeffet sur le rêve et la lucidité ? Lefébure rapporte un cas sans nul doute exemplaire mais qui montre néanmoins lčintérêt de cet exercice. Il sčagit dčun sujet qui ł a pratiqué la concentration sur un détail du phosphène pendant une heure tous les soirs durant une semaine seulement, ce qui est bien peu. Il se mettait au lit juste après. Or le dernier soir, après sčêtre couché, il sčest senti debout hors du corps, ayant lčimpression de voir son corps physique dans son lit. Il a eu tellement peur qučil nča jamais osé recommencer Č.
La pratique du mixage phosphénique peut donc mener par lui-même à la lucidité. Mais Lefébure précise que cette conséquence nčest pas systématique.
Quand pratiquer cet exercice ? Et combien de temps ? Quel que soit la méthode de mixage choisie, il faudra, le premier mois, pratiquer tous les jour, une demi-heure au minimum, en ne fractionnant jamais vos séances au dessous du quart dčheure (environ 3 phosphènes). Si possible, pratiquez trois quart dčheures de façon continue pour respecter un cycle cérébral au cours duquel lčefficacité du mixage augmente progressivement. Les résultats peuvent se manifester au bout dčune semaine ou dčun mois, selon votre sensibilité aux phosphènes. Si, au delà du premier mois vous vous sentez en affinité avec cette méthode, transformez sa pratique en habitude quotidienne. A cette différence près que si vous manquez un jour ou deux, vous ne serez plus obligé de recommencer à zéro pour voir se manifester les premiers résultats au bout dčun mois.

2. La phosphénisation des rêves
Lčautre façon de pratiquer le mixage phosphénique en rapport avec le rêve est indépendante de la proximité de lčendormissement. Elle consiste moins à augmenter la qualité du rêve (pour, par contrecoup, favoriser lčémergence de la lucidité onirique), qučà travailler sur le contenu perceptif du rêve. En effet, le souvenir dčun rêve mixé dans le phosphène finit par se reproduire une nuit suivante, mais plus approfondi et plus riche en détails. Lefébure propose dčutiliser cette pratique pour développer une forme dčauto-analyse. Mais pour ce qui nous concerne, le retour du même rêve est une occasion supplémentaire de provoquer la lucidité.
Pour provoquer ce phénomène de retour, il faut rejouer le rêve tout en gardant à lčesprit qučil sčagit dčun rêve, en y remarquant bien les éléments qui ne peuvent être qučoniriques (tel cousin apparaît dans ce rêve alors qučil est décédé depuis des années, ou lčappartement du rêve nča aucun rapport avec celui que lčon occupe en réalité, etc.). Ainsi, lorsque le rêve reviendra, cette prise de conscience aura beaucoup plus de chance de se manifester. Attention : il importe de faire lčexercice consciemment et non pas mécaniquement. Sinon, vous risqueriez en rêve de vous dire machinalement ł cčest un rêve Č, sans y croire ! Nous reviendrons plus loin, et à plusieurs reprises dans ce module, sur les exercices permettant de développer la conscience, car cčest là un point fondamental.
Mais ce travail sur le souvenir du rêve se révèle encore plus efficace si lčon apprend à repérer parmi ses rêves une catégorie étroitement associée au rêve lucide, sans que la lucidité y soit présente.

REPÉRER LES REVES ASSOCIÉS

Certains types de contenus oniriques reviennent si fréquemment en rêve lucide qučon les considère presque comme des caractéristiques de la lucidité onirique. Rien de plus courant en rêve lucide que de sčenvoler, léviter, passer à travers les murs, sortir de son corps, influencer le cours du rêve, se téléporter, modifier le décor, pour ne parler que des phénomènes les plus facilement reconnaissables en raison de leur caractères frappant. Il faut toutefois noter que ces éléments ne sont pas présents dans tous les rêves lucides. Dčabord parce que les rêveurs lucides ne pensent pas toujours à — ou ne souhaitent pas nécessairement— exercer la liberté que leur apporte la conscience de rêver en sčenvolant ou en modifiant le décor. Mais aussi parce que ces capacités ne sont pas toujours présentes. Un rêveur lucide peut sčapercevoir qučil ne parvient pas à sčenvoler, ou que le décor onirique ne cède aucun pouce de terrain à sa volonté thaumaturgique. Ces caractéristiques ne sont donc pas essentielles au rêve lucide qui se caractérise avant tout comme un état de conscience onirique bien particulier : celui où lčon sait que lčon est en train de rêver.
Comment sčexplique la présence des ces éléments en rêve lucide ? Si lčon prend le cas du rêve de vol, on peut constater plusieurs corrélations possibles :

1) Le rêveur profite de sa lucidité pour sčenvoler. Lčenvol apparaît donc sur fond de lucidité onirique.

Rêve 5 :
Jčarrive en train avec mon père et les enfants. On vient de Bois Dieu (là où habitent mes parents). On sčapprête à repartir vers PŠ (maison de mes beaux-parents). On nča pas besoin de changer de train et je trouve cela vraiment pratique. Mais je dois aller chercher de nouveaux billets. Je laisse les enfants dans le train, ils gardent les places et mon sac, mais ils veulent eux aussi sortir. Je suis obligée dčaller rechercher mon sac puisqučil nčy a personne pour le garder. Jčarrive dans le hall de la gare, il est immense, le plafond est très haut. Dčun seul coup je me dis que cčest un rêve et que je dois pouvoir voler. En effet je vole. Je suis très euphorique, je ris, jčai la sensation extraordinaire de voler. Jčai des fourmillements dans tout le corps. Je recommence encore une fois.
(Sujet n°13, Cčest un rêve, je dois pouvoir voler, extrait, 7 août 1986, réveil à 6h 30)

2) Le rêveur survole un paysage et, après quelque temps, remarque que ce ne peut être qučun rêve, soit parce que la situation est inhabituelle, soit parce qučelle lui procure des sensations particulièrement reconnaissables de lčétat onirique. Dans ce cas la lucidité onirique est déclenchée par le vol.

Rêve 6 :
Rêve lucide vers la fin :
[Š] Je me suis rhabillé et nous sortons de la chambre par une porte à côté qui donne sur la cour de lčimmeuble. Cčest le jour. Christian est remplacé sans transition par un vieux professeur et sa fille. Sur le seuil de la porte je fais une cabriole acrobatique sur les mains - moi-même étonné de pouvoir le faire - puis plusieurs autres sur la petite pelouse qui se trouve dans la cour.
Le vieux savant et sa fille se sont assis sur un banc au soleil. Je leur dis : «Vous avez vu ? Je suis Windman le justicier.» En même temps, je fais entre mes dents le bruit du vent. Pour leur montrer que cčest vrai, je mčenvole et fais des évolutions aériennes dans la cour. Je suis vêtu dčun collant rouge et dčune grande cape de même couleur - cčest évidemment un des héros de bandes dessinées de «Strange». Comme je suis un super héros, il faut que je me rende utile en poursuivant des malfaiteurs. En voici un dans le couloir dčentrée de lčimmeuble. Je le réduis à néant en quelques coups de botte et de poing. Il est tout ratatiné. Il faut que je mčen débarrasse dčune façon ou dčune autre. Sachant que je suis dans une bande dessinée, je déchire un morceau de papier sur lequel nous sommes représentés et je pousse le malfrat dans le trou. Cette idée me paraît si comique que je ris (réellement) et me réveille.
Le rêve est devenu lucide progressivement. Cčest seulement quand je me suis envolé en Windman que la lucidité était complète.
(Sujet n°10, Windman le justicier, extrait, 24 décembre 1985)

3) La corrélation entre le vol et la lucidité est telle que certains auteurs comme Van Eeden remarquent que lorsqučils ont rêvé plusieurs nuits de suite de vol, ils savent qučun rêve lucide ne va pas tarder à se manifester. Ici il y a une sorte dčł effet dčannonce Č dčun type de phénomène onirique par un autre.
Ces phénomènes permettent de faire également un certain nombre de constatations qui risquent de passer inaperçues si lčon se focalise sur la seule lucidité mais qui, toutefois, présentent un intérêt évident pour lčinduction. Reprenons lčexemple du rêve de vol.
1) Si un rêve de vol laisse présager un rêve lucide pour une nuit suivante, cčest que ce rêve de vol nčest pas lucide.

Rêve 7 :
ł Je vole en serrant les poings. Je me bascule légèrement en avant en sautant, je vole à la verticale à un mètre du sol. Je me déplace très facilement partout. Je me dis que cčest la réalité, que je suis dans la réalité, que lčon peut voler dans la réalité Č
(Sujet n°17, sans titre, janvier 1990)

4) Si un rêve de vol devient lucide après un certain moment, disons un point L, toute la durée du rêve jusqučà L nčest pas lucide. Il suffit de reprendre un des rêves déjà cités, par exemple le n°5, pour sčen rendre compte. On peut le décomposer ainsi :

- partie non lucide :
Jčarrive en train avec mon père et les enfants. On vient de Bois Dieu (là où habitent mes parents). On sčapprête à repartir vers PŠ (maison de mes beaux-parents). On nča pas besoin de changer de train et je trouve cela vraiment pratique. Mais je dois aller chercher de nouveaux billets. Je laisse les enfants dans le train, ils gardent les places et mon sac, mais ils veulent eux aussi sortir. Je suis obligée dčaller rechercher mon sac puisqučil nčy a personne pour le garder. Jčarrive dans le hall de la gare, il est immense, le plafond est très haut.
- partie lucide
Dčun seul coup je me dis que cčest un rêve et que je dois pouvoir voler. En effet je vole. Je suis très euphorique, je ris, jčai la sensation extraordinaire de voler. Jčai des fourmillements dans tout le corps. Je recommence encore une fois.

Il sčagit bien du même rêve qui comporte une partie non lucide et une partie lucide.
Si lčon adoptait une classification strictement binaire, ces rêves de vol non lucides ou ces passages de rêves précédant la lucidité devraient être qualifier dčł ordinaires Č. Or, outre leur rapport direct ou indirect à la lucidité, un simple examen de fréquence des ces phénomènes oniriques semble indiquer qučils ne sont pas très courants, en tous cas chez les adultes pour qui les rêves de vol (non lucides) sont plutôt lčexception que la règle. Il est donc possible, du point de vue de la simple description, de les considérer comme une catégorie à part que nous nommerons ł rêves associés Č (sous entendu : associés au rêve lucide).
Ces rêves associés, bien que peu courants dans la vie onirique habituelle, nčen sont pas moins plus nombreux que les rêves lucides chez un rêveur non entraîné. On peut donc se demander si un sujet qui rêve régulièrement qučil vole dans les airs sans devenir lucide ne passe pas ł à côté Č de la lucidité par manque dčun simple élément déclenchant. Toujours est-il que dans les faits, se visualiser en train de voler en rêve constitue une bonne méthode dčinduction du rêve lucide.
Par ailleurs, dans la mesure où un état de conscience comme la lucidité nča pas de contenu perceptible propre (dans la version métaphysique du Petit Prince, ce dernier devrait demander à lčaviateur : ł Sčil te plaît, dessine-moi une conscience ! Č), le rêve de vol - ou les autres types de rêve associé - constitue un support pour lčimagination inductive. Mais, là encore, ce genre dčexercice ne donne sa pleine efficacité que lors du développement de certaines qualités conscientielles, faute de quoi lčinduction risquerait de donner de nouveaux rêves de vol, sans lucidité.
Une étape préliminaire de ce développement conscientiel est franchie lorsqučon a appris à reconnaître ses rêves, cčest-à-dire à les différencier les uns des autres et à identifier la ou les catégories de rêves associés auxquelles ils appartiennent.
A ce stade, il nous faut revenir à la tenue de votre journal de rêves. Vous pratiquez maintenant depuis deux mois les méthodes de rappel de la précédente leçon et vous consignez quotidiennement au moins un ou deux rêve dans votre journal de rêves. Il est temps maintenant de reprendre votre journal et de lčétudier sous lčangle des rêves associés. Dans le principe, il sčagit de repérer ces rêves et de noter leurs caractéristiques en marge du récit. Pour vous aider dans cette tâche, nous allons commencer par une description des rêves associés les plus frappants, à laquelle vous vous reporterez pour cette recherche. Nous verrons ensuite quel parti en tirer pour lčinduction de la lucidité.

I. LES REVES À RECONNAÎTRE
Toutefois, pour des raisons pratiques, nous nčallons pas limiter ce repérage aux rêves associés mais lčétendre aux rêves lucides que vous avez peut-être déjà obtenus. Ces derniers, en effet, ne sont pas tous de même nature. Sans entrer pour le moment dans le détail, il est nécessaire de distinguer entre les rêves pleinement lucides et les rêves qui ne le sont que partiellement.

A. TYPES DE REVES LUCIDES
Nous distinguerons trois types de rêves lucides :
1. Rêve pleinement lucide
Un rêve pleinement lucide est un rêve au cours duquel le rêveur est conscient de rêver et conserve le sentiment de son identité ainsi que le souvenir de sa vie de veille. Il se produit au cours du sommeil naturel quand le dormeur est coupé physiquement du monde qui lčentoure.
Une précision doit être apportée en ce qui concerne la ł conscience de rêver Č : le rêveur perçoit son environnement comme étant un rêve (ce qui ne veut pas dire qučil le considère comme irréel, mais simplement qučil le compare à celui de la vie de veille) et en même temps il a conscience dčêtre lui-même en train de rêver. Si seule lčune de ces deux conditions est remplie il sčagit dčun autre type de rêve lucide plus précisément appelé ł demi-lucide Č (voir ci-après).
2. Rêve demi-lucide
Les rêves demi-lucides sont de deux sortes.
a. Le rêveur est conscient que son environnement est un rêve mais ne se rend pas compte qučil est, lui, en train de rêver. Par exemple un rêveur peut, dans son rêve, sčapprêter à descendre des escaliers et se dire : ł Non, il ne faut pas descendre dans un rêve, mais plutôt monter Č. Sa décision de monter lui est dictée par la conscience qučil a de se trouver dans un rêve, à propos duquel il respecte certaines règles. Mais il nčest pas conscient dčêtre lui-même en train de rêver, en ce sens qučil se prête sans sčen rendre compte à ce que le rêve attend de lui.
b. Le rêveur est conscient de rêver en ce qui concerne son activité mentale. Il se rend nettement compte qučil nčest pas dans son état de veille normal. Cependant le doute subsiste quant à son environnement. Il le voit en rêve, bien sûr, mais peut-être cet environnement coïncide-t-il avec celui de la vie de veille. Il arrive qučil sčimagine être victime dčune crise de somnambulisme dont il ne peut sčéveiller et hésite à accomplir des actes dangereux comme se jeter du haut dčun immeuble pour sčenvoler, de peur de sčécraser physiquement au sol.

Rêve 8 :
ł Rêve lucide : Dans une pièce, éclairée dčun côté par la lumière du soleil qui passe à travers une fenêtre longue, mais de hauteur étroite. Au fond deux portes donnent, lčune sur ce qui ressemble à une salle de classe avec éclairage électrique normal, et lčautre sur une salle avec tables longues et éclairage au néon. Je décide qučaucune ne me convient et me dirige vers la fenêtre. Je mčengage sur le rebord, avec les sacoches que jčemporte : un baluchon, un sac reporter, une serviette.
ł En équilibre sur le rebord. Dehors il faut beau, paysage plutôt jaune marron, mais je ne le regarde pas. Brusquement je me dis : «Et si ce nčétait pas un rêve ?» Je laisse mes sacs à lčintérieur. Vais-je sauter ? Il faut que jčouvre les yeux pour vérifier si cčest un rêve. Si je peux les ouvrir et que le paysage reste le même, alors ce nčest pas un rêve. Je les ouvre dčabord dans la pièce puis Š (sur ma chambre, dans mon lit, et je me réveille) Č.
(Sujet n°16, Est-ce que je saute ?, 7 juin 1984)

3. Rêve prélucide
Le rêveur se pose des questions au sujet du rêve et de son état de conscience. Est-ce un rêve ? Est-ce la vie de veille ? Il nčarrive pas à se décider.

Rêve 9 :
Au cours de deux rêves successifs dčun sommeil plutôt agité, je fus préoccupée par la même inquiétude cauchemardesque et absurde. Il me semblait que certains articles de la maisonnée - de belles pièce de brocard, des rideaux de soie - avaient été laissés dehors, exposés à la pluie et à la neige fondante. Lčidée dčavoir à faire sécher et nettoyer ces choses devint très vite une obsession, qui tourmentait mon imagination dans le rêve. Dans la seconde partie du rêve - je suppose que cčétait au moment où jčétais sur le point de mčéveiller - cette inquiétude était devenue très aiguë. Je me mis alors à être présente dans une double capacité : il y eut un «Je» qui interrompit le rêve et se mit à discuter sévèrement avec la rêveuse, mettant en doute la réalité de ces ennuis qui prenaient tant dčoppressive importance. Le «Je» disait : «Ce nčest qučun rêve, jčen suis certaine ; il faut que tu te réveilles», mais la rêveuse répondait ; «Cela ne peut pas être un simple rêve, parce que ce nčest pas seulement dans celui-ci, mais aussi dans le rêve précédent que je me suis aperçue que ces choses étaient dehors, dans la neige ; cčest forcément une réalité, sans quoi cela ne se produirait pas deux fois de suite. Dčailleurs, voici les choses elles-mêmes. Tu peux les voir et les toucher». Le «Je» était très perplexe car, effectivement, tout cela semblait bien réel, même pour lui, et cčétait troublant. Mon «Je» examina à nouveau les tissus salis. Ils étaient très mouillés et dégoulinants entre ses mains et leur réalité paraissait convaincante. «Peut-être» me dis-je, «certains faits apparents sont-ils réels.» Je ne parvenais pas à débrouiller le vrai du faux, mais mon «Je» était néanmoins certain qučil sčagissait «dčun ennui de rêve, et non pas dčun ennui de veille.» - «Non» répliqua la rêveuse, «car tu peux voir et toucher ces tissus mouillés. Ils sont trop vrais pour être des objets de rêve.» - «Très bien» dit mon «Je», «veux-tu les mettre à lčépreuve du toucher et faire un test ? Réveille-toi et vois quelle part de tout cela nčest qučun rêve!». Sur quoi je mčéveillai.
(Rêve de Mary Arnold-Forster, extrait de Studies in Dreams, p. 172-173)

De tels rêves débouchent souvent sur la pleine lucidité.
Rêve 10 :
ł Jčessaie de retrouver le rêve précédent. Finalement jčarrive à mčen souvenir. Cčest une histoire où je mčenfuis à bord dčune voiture conduite par CŠ. Lčaction se passe dans un endroit calme, par beau temps. Il faut que je passe inaperçu pour mčenfuir. Normalement je suis condamné. A quoi ? Il faut que je passe par un endroit précis. Jčécris le rêve sur une ligne continue mais courbe et très longue, peut-être rose.
ł Je suis dans mon lit et jčentends des bruits de voix dont celle de CŠ. Il est donc à la maison, cčest pour cela que jčai rêvé de lui ? Il parle avec ma sŠur et il va partir. Je me lève pour aller dans le couloir. Mais de toute façon il est déjà parti. Je me retourne : ma chambre a changé. Au lieu dčun bureau il y en a trois, disposés comme suit [dessin]. Jčai lčimpression dčavoir plus de place et dčêtre moins étouffé par les bibliothèques. En criant pour me faire entendre, je demande à ma mère si elle a changé quelque chose à ma chambre. Et je me mets à sauter sur place sur mon lit. Je pense que, si tout à changé, ça doit être un rêve. [Pour le vérifier] Je prends mon élan et me laisse tomber sur le plancher. Si ce nčest pas un rêve lčatterrissage va me blesser sérieusement.
ł Mais le plancher est déjà sous moi, je sens ma joue qui y repose doucement. Je me relève. Ma chambre est à nouveau normale. Je me précipite dans le couloir. Cette fois il y a des bibliothèques dans le couloir. Je crie : «cčest un rêve». Ou peut-être que je veux encore le vérifier. Jčarrive à la hauteur de la chambre de ma sŠur. Jčy trouve ma sŠur, tante FŠ et quelqučun dčautre. MŠ ? Je dis à ma sŠur que cčest un rêve. Elle me dit que non [Š]
(Sujet n°16, «Est-ce un rêve ? Double test: chute et attitude», 31 janvier 1985)

B. TYPES DE Rêves associés
Commençons par donner le principe général qui permet de reconnaître les rêves associés. Un rêve est associé au rêve lucide de lčune des trois façons suivantes :
1. Rêve sur le rêve
Rêve où il est question dčune façon ou dčune autre du rêve ou du rêve lucide. Le sujet rêve qučil note ses rêves, qučil veut faire un rêve lucide, ou bien il réfléchit en rêve sur la notion de lucidité onirique, sans pour autant être conscient de rêver.

Rêve 11 :
ł Je suis dans une voiture avec Eric Schmitt. Nous allons à lčinfirmerie pour la séance de vaccination. Nous sortons de la voiture et il fait chaud. Je prends mon papier et mon stylo et dis que jčen ai pour une seconde à noter ce rêve. Je pose le papier sur le toit de la voiture et commence à écrire la date. Le toit de la voiture est poussiéreux. Jčécris que le rêve commence quand je suis avec Antoine dans la voiture Č
(Sujet n°16, sans titre, 4 janvier 1982)

2. Rêve avec conscience intense
Rêve dans lequel lčétat de conscience du rêveur se rapproche de la lucidité onirique sans pourtant lčatteindre. Le rêveur se sent exister ou encore il éprouve la qualité de sa conscience, sans pour autant se rendre compte qučil rêve.
3. Rêve dont le contenu est caractéristique du rêve lucide sans que la lucidité soit présente (par exemple rêve de vol ou de sortie hors du corps...) ou rêve qui accompagne fréquemment le rêve lucide (rêve de faux-éveil, de mauvais éveil, etc.).
a. rêve de faux-éveil
Rêve dans lequel le rêveur croit se réveiller, chez lui ou ailleurs. Il survient souvent à la suite dčun rêve lucide et le rêveur, croyant être éveillé, réfléchit à lčexpérience qučil vient de vivre (faux-éveil de type 1). Il arrive aussi que lčétrangeté de lčenvironnement (faux-éveil de type 2) provoque un retour de la lucidité.


Rêve 12 :
ł [Š] Deuxième séquence : je rêve ensuite que je me réveille, ma sŠur CŠ est là. Je lui raconte mon vol. Tu apparais ensuite, je te dis combien je suis contente dčavoir obtenu ce résultat. Je parle des fourmillements comme une preuve dčavoir volé. Je veux noter le rêve. Je prends un carnet. Il y a plein dčopérations dessus et quelques dessins au crayon noir (tête de vampire). Ce nčest pas mon carnet, cčest celui de ma sŠur. Je lui réclame un carnet. La cheminée de la salle à manger de mon enfance est là. CŠ fait glisser la plaque du fond et sort successivement trois volumes. Ce sont des livres très gros, très lourds, mon poignet plie quand je les saisis. Ce sont des livres dčenfance, des contes et légendes avec de belles illustrations, des enluminures tout autour des pages. Je fais remarquer qučil nčy a pas de place pour écrire, cela ne me convient pas Č.
(Sujet n°13, «Cčest un rêve, je dois pouvoir voler», extrait)

b. rêve de vol ou de chute
Il sčagit grosso modo dčun rêve dans lequel le rêveur vole ou flotte dans lčespace, si possible sans aucun moyen de locomotion (avion, hélicoptère, etc.). Un rêve dans lequel on sčefforce de «décoller» sans y parvenir est un rêve de tentative de vol et doit être classé parmi les rêves de vol. Ce type de rêve est une excellente occasion dčaffiner la perception que nous avons de nos propres rêves. Dans la littérature sur le rêve, en effet, le vol onirique apparaît surtout comme une donnée que lčon cherche à expliquer mais sa définition ou sa description semblent superflues. Or une simple lecture de plusieurs journaux de rêves montre que non seulement la conception du vol onirique diffère dčun rêveur à lčautre, mais aussi que le vol est susceptible de prendre une variété de formes qui met en question toute réduction à une catégorie unique. Or une telle réduction est bel et bien impliquée par le cadre dans lequel on étudie généralement le rêve de vol, qučil sčagisse de lčinterpréter ou de le situer par rapport à la lucidité onirique (cčest-à-dire la conscience de rêver au cours du rêve, avec laquelle les rêves de vol ont un rapport étroit, comme nous lčavons indiqué).
Une telle approche a priori fausse nécessairement lčexamen en ce qučelle fait porter lčinvestigation plus sur lčidée du vol onirique que sur sa manifestation pour le rêveur. Une approche purement descriptive constitue donc une étape nécessaire pour dissiper les filtres théoriques souvent inconscients qui entravent à la fois la recherche sur le rêve et lčextension de lčexpérience onirique à des possibilités nouvelles. Dans le cas du rêve de vol, un simple examen des journaux de rêves permet de constater sa richesse de formes ainsi que lčexistence de rêves qui lui sont corrélés au vol. Puisque nous avons privilégié lčexemple du rêve de vol dans notre présentation, ce type de rêves est plus largement passé en revue dans une Annexe intitulée : ł Quelques formes de rêves de vol Č que vous trouverez à la fin de ce cours (rêves 13 à 30).

c. Les rêve de sortie hors du corps.
Le rêveur rêve qučil quitte son corps qui repose sur le lit, généralement pour sčenvoler. Le rêve 26 qui est à la fois un rêve de vol et un rêve lucide, est également un rêve de sortie hors du corps.
d. Les rêves de miroir (ou de double)
Le rêveur se voit dans un miroir, ou il voit son double.

Rêve 31 :
ł Quelque chose fait peur à tout le monde dans une pièce. Je mčapproche. Jčai une veste ou un blazer bleu et un pantalon marron. Jčentends une voix qui mčappelle patron et me demande de lui pardonner. Cčest mon démon. Il prend ma forme et me regarde dans les yeux. Je sens que je sombre dans un sommeil hypnotique. Alors je lui saisis la tête et cogne jusqučà ce qučil disparaisse en moi, tandis qučun dernier coup me fait tapoter le pli de mon pantalon.
ł Quand je me retourne tout le monde a disparu. Il ont eu peur. La porte de la salle est fermée de lčintérieur, au verrou, ce qui est bizarre. Dčun geste jčarrache la porte et je descends les escaliers en volant Č.
(Sujet n°16, «Le démon qui me demandait pardon», 17 juin 1983)

Rêve 32 :
ł Je me lève pour aller dans la salle de bain. Ma sŠur sčy trouve. Je lui demande comment vont mes yeux. En même temps je me regarde dans le miroir, vois que mes yeux sont entièrement blancs avec des points rouges. Je suppose que la partie noire est relevée vers lčintérieur. Ma sŠur crie que je ne suis pas le vrai CŠ. Elle a peut-être raison. Je rentre dans ma chambre, me rends compte que je fais un rêve lucide puisque ça ne peut pas être vrai [Š] Č.
(Idem, sans titre, extrait, 24 septembre 1982)

e. Les rêves de tremblement
Le rêveur sent, en rêve, une vibration lui parcourir le corps. Cette vibration peut aller du tremblement au fourmillement. Elle est généralement suivie dčune sensation de légèreté.

Cette simple liste vous permet de comprendre qučil est inutile de sčobnubiler sur une catégorie particulière, le vol par exemple, pour certaines préparations dčinduction. Ceux qui ne sčenvolent jamais en rêve utiliseront tout aussi efficacement des rêves de miroir ou de double dont ils ont le souvenir plutôt que des scènes de vol onirique fabriquées de toutes pièces. Mais cette utilisation demande à ce que lčon ł fasse provision Č de ces types de rêves.


II. REPÉRER SES REVES LUCIDES ET ASSOCIÉS DANS LE JOURNAL DE REVES
Pour ce travail de recherche il va vous falloir relire attentivement votre journal de rêve. Si vous teniez un journal de rêves avant de vous mettre à la présente méthode, nčhésitez pas à remonter un an en arrière. Mais attention : relire son journal de rêves demande de lčapplication et du temps. Combien de fois suis-je tombé sur des journaux de rêves dûment annotés et dont, pourtant, les auteurs avaient oubliés de signaler ici un rêve lucide, là un rêve de vol, et ainsi de suite. Il faut relire soigneusement chaque rêve en gardant à portée de la main la liste qui vient dčêtre donnée. Certains rêves entreront parfois dans deux catégories (exemple : rêve de vol suivi dčune sortie hors du corps, ou encore rêve lucide suivi dčun faux-éveil). Dans ce cas notez les deux en marge (rêve associé : vol + sortie hors du corps ; ou rêve associé : lucide + faux-éveil). Prévoyez des périodes précises pour cette relecture. Rappelez-vous qučelle ne peut être faite rapidement sans risquer de laisser échapper un élément qui a son importance, si petit soit-il. Ce qui compte, pour lčinstant, ce nčest pas la taille de lčélément en question (le fait qučil ne se manifeste que quelques instants dans un rêve par ailleurs ł ordinaire Č) mais sa présence. A partir du moment où vous en découvrez lčexistence, vous pouvez le développer. Par ailleurs, la découverte de nouveaux rêves associés ajoute des cordes à votre arc pour divers types dčexpérimentations que nous verrons par la suite.
Si vous en avez le temps, recopiez ces rêves et classez-les par genres (pleinement lucide, demi-lucide, prélucide, vol, double, etc.). A lčintérieur de chaque genre, adoptez une progression chronologique. Ce travail présente un triple avantage :
1) il vous permet de juger de votre évolution dans des domaines oniriques précis ;
2) il vous donne un recueil personnel de rêves par types, immédiatement utilisable pour certains exercices de rêve éveillé que nous aborderons bientôt ;
3) il renforce votre sentiment de familiarité avec votre univers onirique. Ajoutons que dčune façon générale, il est bon de relire régulièrement son journal de rêves pour renforcer ce lien. Ainsi on peut une fois par semaine relire tous les rêves de la semaine, une fois par mois relire tous les rêves du mois, une fois par trimestre passer en revue les rêves du trimestre (à ce stade il devient difficile de tous les lire) et sélectionner pour la lecture ceux qui ont fait lčobjet dčannotations en marge, qučelles concernent les types de rêves que nous avons mentionnés ou qučelles soient de nature plus personnelles. De temps en temps il est bon également de jeter un coup dčoeil sur les rêves des années écoulées, par exemple en vérifiant si lčon est capable dčen restituer le contenu à la simple lecture du titre.
Voyons maintenant une première façon de tirer parti de ce travail pour lčinduction de la lucidité.

III. COMMENT PASSER DU REVE ASSOCIÉ À LA LUCIDITÉ ONIRIQUE ? LA MÉTHODE LORA.
Étape 1
Prenez votre recueil par genres (ou votre journal de rêves si vous nčavez pas eu le temps de classer vos rêves) et relisez tranquillement une catégorie donnée, par exemple celle qui concerne le rêve de vol, le soir avant de vous coucher. Si possible, faites cette lecture alors que vous êtes déjà au lit.
Étape 2 (facultative) :
Pratiquez le mixage phosphénique pendant une durée minimum de trois quarts dčheure. Choisissez lčun des deux exercices suivants et tenez-y vous pendant un mois :
- vous revivez sous phosphènes les rêves que vous venez de relire, plusieurs fois si votre recueil est peu fourni ;
- ou vous pratiquez la concentration sur un détail du phosphène, comme vu précédemment.
Étape 3
Après avoir éteint la lumière et vous être allongé, relaxez-vous. Dans le principe, la relaxation consiste à détendre le corps et à alléger lčesprit, bref à dissoudre les tensions corporelles et psychiques. Si vous pratiquez déjà un type de relaxation, conservez vos habitudes, à condition de ne pas vous laisser surprendre par le sommeil. Sinon procédez comme suit :
Phase 1 : Portez votre attention sur votre respiration, et laissez-vous porter par elle pendant quelques minutes. Lorsque vous vous sentez «flotter» dans la détente, passez à lčétape 4. Si aucune modification ne survient, passez à la phase 2.
Phase 2 : Inspirez profondément, retenez lčair quelques secondes, puis laissez-le sčéchapper de lui-même tout en reportant votre attention sur votre corps et en imaginant qučil est un ballon en train de se dégonfler. Au bout de quelques respiration, vous sentirez les tensions disparaître, si vous étiez tendu, et si vous étiez déjà détendu, cette détente sčapprofondira. Point important : il ne faut surtout pas compter les respirations. Vous abandonnerez cet exercice lorsque vous sentirez la détente sčinstaller - ou sčapprofondir - en vous.
Phase 3 : Répétition de la phase 1 avant de passer à lčétape 4.
Étape 4
Revivez un à un chacun des rêves relus, dans le détail, tout en restant attentif à la particularité qui les désigne comme rêves. Dites-vous, par exemple, ł je vole, donc cčest un rêve Č, chaque fois que lčoccasion se présente, sans pour autant interrompre votre remémoration. Endormez-vous sur ces images. Si vous avez épuisez votre stock de rêves, recommencez au début.
Étape 4bis : Corrélativement à cette consigne, il convient dans la journée de développer la conscience de vos perceptions vigiles.
Revenons quelques instants sur la question : Qučest-ce qučêtre conscient de rêver ? Cčest dčabord être suffisamment présent à son environnement onirique pour en remarquer la qualité onirique. Mais si nous nous conduisons en rêve comme à lčétat de veille, il y a peu de chance que cette qualité dčattention se manifeste. Cela revient à dire qučil faut la développer à lčétat de veille, dans la vie éveillée de tous les jours.
Nous reverrons plus amplement ces questions qui ont trouvé des développements aussi bien dans le yoga tibétain que chez le chercheur allemand Paul Tholey, et dont lčimportance est telle que la plupart des expérimentateurs les ont intégrées à leurs propres méthodes. Toutefois, le manque dčun cadre conceptuel adéquat a entraîné certaines difficultés sur lesquelles je reviendrai. Pour lčinstant, contentons-nous de quelques remarques :
- un support psychophysiologique (par exemple les phosphènes de Lefébure) aident à ł densifier Č les images onirique ;
- un exercice mental, tel que la visualisation dčun rêve auquel on ajoute lčidée qučil sčagit dčun rêve, est également très efficace, mais il nčaurait aucun sens à être fait machinalement, comme nous lčavons déjà vu.
La conclusion, sommaire mais exacte, est qučil faut respecter une sorte de hiérarchie : conscience - pensée - action. Passer à lčaction (faire des phosphènes, par exemple) sans lčappuyer sur une pensée, ou se complaire dans une pensée (revivre un rêve lucide ou associé) sans lčorienter par une certaine qualité de conscience (ce qui revient approximativement à dire : je sais que je pense, il y a là quelqučun qui pense), diminue lčefficacité de toute pratique.
Aussi, pour les deux mois qui viennent, il sera bon de vous entraîner quotidiennement, si vous ne le faites pas déjà, à prendre conscience de vos perceptions et de vos sensations.
Mais, objecterez-vous peut-être, je suis conscient de tout cela puisque je suis éveillé. Réponse : il ne sčagit pas de cette simple conscience qui vous permet de vous guider ł à vue Č dans votre vie quotidienne, mais de quelque chose de plus «concentré» : être conscient que lčon est conscient de ce dont on est conscientŠ La formulation a sans doute lčair compliquée mais, rassurez-vous, la pratique est relativement simple. Et la compréhension sčaffinera au fil de la pratique. Pour cette raison, les exercices conscientiels doivent suivre une progression régulière. Si vous pratiquez déjà ce qui suit, continuez. Pour les autres, efforcez-vous plusieurs fois dans la journée de procéder comme suit :
Phase 1 : Regardez ce qui vous entoure comme si vous étiez sur une autre planète. Ceci pour vous inciter à prêter réellement attention à vos perceptions. Que voyez-vous, qučentendez vous ? Que sentez-vous ? Quel est votre état émotionnel ?
Phase 2 : Observez tout cela mais évitez autant que possible dčutiliser les mots du langage courant. Cet exercice a pour but, dčune part, de développer votre attention perceptive et, dčautre part, de vous amener à sentir et à percevoir sans penser. Cela vous semblera peut-être impossible. Toutefois gardez cet objectif comme un idéal vers lequel diriger vos efforts. Dans la pratique vous constaterez que lors de cet exercice le pourcentage de ł présence Č alloué aux perceptions augmentent tandis que celui alloué à la pensée en mots (et, par la suite, en images) diminue.
Phase 3 : Notez les résultats de vos efforts dans votre journal de rêve, ainsi que les phénomènes inhabituels qui pourraient survenir (dilatation ou rétraction temporelle, effet tunnel, expansion de la conscience, joie débordante sans raisonŠ). Ces phénomènes sont absolument sans danger, et généralement ils ne durent pas longtemps. Si par hasard ils se prolongeaient, il est très facile dčy mettre fin : il suffit de se plonger dans une activité typiquement intellectuelle : lecture, réflexion, projetŠ
Phase 4 : Lorsque vous revivez vos rêves associés, introduisez-y la même qualité dčattention (ou sa tentative).


Étape 5 :
Répétez le processus de lčétape 4 au rendormissement du milieu de nuit que vous devez maintenant maîtriser. Rappelons qučil sčagit dčinterrompre son sommeil en cours de nuit pour une durée dčau moins un cycle avant de se recoucher (cette interruption peut être allongée à 2 ou 3 cycles si lčon dispose du temps nécessaire pour dormir ensuite). De façon générale répétez ce processus à tous les rendormissements, qučil sčagisse de celui du milieu de nuit, de la sieste de lčaprès-midi ou même de celui qui fait suite à un éveil impromptu (bruit extérieur, besoin naturelŠ).
Étape 6
Continuez ainsi pendant une semaine entière. (La semaine suivante, continuez la méthode mais passez à un autre genre de rêves associés, par exemple les rêves de miroir.)
Étape 7
Au total persévérez pendant une période dčun mois. Notez, en plus de vos rêves, tous les phénomènes inhabituels pour vous, même sčils ne vous semblent pas, à première vue, relever du domaine du rêve.
Étape 8
Un tableau récapitulatif peut vous aider à mesurer vos progrès ou vos erreurs. Ce tableau est donné dans les pages suivantes sous le titre ł Tableau de la méthode dčinduction de la lucidité onirique par la reconnaissance des rêves associés Č. Collez-le dans votre journal de rêves et remplissez-le régulièrement.
Certains nčauront peut-être aucun rêve associé à se mettre sous la dent. si vous pensez vous trouver dans une telle situation, relisez attentivement votre journal de rêve. Nčavez-vous pas laissé passer un rêve sur le rêve dans lequel vous cherchez, même pour une brève seconde, à noter vos rêves au cours du rêve même ? Si réellement vous ne trouvez rien, passez immédiatement à la méthode suivante (LOREL).

INDUIRE LE REVE LUCIDE PAR LE REVE ÉVEILLÉ LIBRE (MÉTHODE LOREL)

Cette méthode peut servir de substitut à lčinduction des rêves lucides par la reconnaissance des rêves associés, si ces derniers vous font défauts. Si tel nčest pas le cas mais que vous vous sentez plus attiré par elle, vous pouvez également la pratiquer de préférence à lčautre. Lčimportant est de persévérer assez longtemps (un mois ou deux) sur une même méthode.
Ici les consignes à suivre sont particulièrement simples puisqučelles ne mettent en jeu que deux techniques : le rêve éveillé et la relaxation. Nous avons déjà vu comment se relaxer. Dans le cas présent, il sera sans doute nécessaire dčapprofondir encore cette relaxation, en laissant lčattention se porter sur les parties du corps qui se manifestent à elle, sans laisser des pensées lčaffaiblir, jusqučau moment où vous vous sentirez prêt à plonger dans un rêve éveillé. Précisons que ce sentiment particulier ne vient qučavec la pratique. Aussi, si au début vous ne SENTEZ rien, commencez tout de même le rêve éveillé. La relaxation favorise certes le rêve éveillé, mais elle nčen est pas une condition sine qua non. Cčest parfois même le rêve éveillé (en abrégé RE) qui permet dčatteindre une relaxation profonde !
Jčai choisi lčappellation ł rêve éveillée libre Č, en 1985, pour différencier les expériences de mon groupe de recherches de celles des pratiquants du rêve éveillé dirigé mis au point par Desoille et utilisés en thérapie. Le rêve éveillé dirigé se fait nécessairement en présence dčun thérapeute et suit certaines lignes imposées (exploration du haut et du bas, évocation de certaines figures archétypales, etc.). Le rêve éveillé libre nčest soumis à aucune de ces limitations, même sčil peut sembler utile de se chercher un ł guide Č à lčintérieur du rêve éveillé.
En ce qui concerne la pratique du rêve éveillé, les remarques suivantes, consignées par un rêveur lucide expérimenté, peuvent se révéler extrêmement utiles pour les débutants :
ł Ça marche dčautant mieux que la détente préalable est profonde, mais dčautres facteurs interviennent - être en relativement bonne forme physique, avoir vraiment envie dčapprendre quelque chose du RE.
ł Je pense que cčest à chacun de voir dans quelle position il pratique le RE. Jčindique simplement que pour moi les trois positions couchées se sont un peu spécialisées. Sur le dos, cčest la position de relaxation, mais aussi de «méditation» informelle. Sur le côté gauche, cčest la position de lčimagination, et cčest toujours dans cette position que je commence mes rêves éveillés, même si jčen change par la suite. Sur le côté droit, cčest la position de lčendormissement, mais aussi celle des «lumières» diverses apparaissant avant le sommeil.
ł Au début, le plus important me semble de trouver un lieu où se fera la rencontre éventuelle avec un guide et qui servira de point de départ. Si ce lieu se présente en images hypnagogiques, tant mieux, mais ce nčest pas absolument nécessaire. Il peut prendre forme en ce que jčappelle «imagination sensorielle», cčest-à-dire qučon se le représente sensoriellement sans vraiment le voir ni le sentir.
ł Un bon moyen de commencer est de se décrire à soi-même verbalement ce qui se passe. Exemple : «Pour le moment je ne vois aucun lieu... maintenant, je ressens vaguement des formes arrondies... ça pourrait être des rochers... des rochers couverts de mousse... Oui, cčest un sous-bois de la forêt de Fontainebleau avec des rochers couverts de mousse...». (Cette espèce de commentaire verbal est toujours utile dans les passages confus du RE lui-même. Parfois il se poursuit tout au long du rêve, mais quand ce nčest pas le cas, on peut y avoir recours dans les moments où lčon sent que le rêve risque de se désagréger.)
ł Lorsque le lieu est plus ou moins précisé, il suffit en général dčattendre et le guide finit par paraître. Tout au moins cčest ainsi pour moi. Mais je remarque qučil paraît rarement tant que je me vois moi-même de lčextérieur. Le moment où je le perçois est en général celui où ma conscience sčidentifie à mon personnage du RE. Quelquefois, il est nécessaire dčappeler le guide - genre «Eh, oh! où est mon guide ?»
De toute façon il faut être prêt à le trouver nčimporte où et surtout à ce qučil puisse être nčimporte quoi. Le commentaire verbal peut servir à le préciser, tout comme pour le lieu.
ł Exemples : «Je sens une vague présence. Maintenant jčaperçois une forme vague sur ma droite. Cčest un homme debout dans lčombre. Il porte un chapeau, etc.»
Autre exemple : «Je ne vois que des troncs dčarbre. Certains sont très rapprochés. Ce ne sont pas vraiment des arbres. Ce sont des sortes de poteaux. Comme les jambes dčun mannequin. Cčest une sorte de totem avec un long nez. Cčest un Pinocchio géant...»
ł Mais il arrive que le «guide» ne prenne pas forme, qučil reste, par exemple, une simple présence invisible. Il ne faut pas vouloir qučil se précise à tout prix. Sčil continue à ne pas avoir de forme, il faut lčaccepter ainsi - pour moi les «guides» informels sont souvent plus utiles que ceux qui se manifestent en images. Ceux que je «vois» deviennent souvent informels aux moments les plus importants, simples présences auxquelles je ne peux faire appel avec une question quand je ne comprends pas ce qui se passe.
ł Lorsque le «guide» est là, on lui demande généralement sčil veut bien nous guider, et il arrive qučil ou elle réponde non. Je demande alors «Mais peux-tu me conduire jusqučà mon guide ?» et la réponse est généralement oui.
ł On peut demander à un «guide» de dire son nom. Jčai remarqué que souvent je nčentendais pas bien sa réponse, mais que le nom surgissait tout à coup avec certitude comme si je lčavais toujours connu. Ceci nčest pas essentiel. Beaucoup de guides demeurent anonymes, mais ceux qui sont nommés présentent un avantage : il est assez facile de les retrouver ensuite dans dčautres R.E.
ł Si lčon a une question précise à poser, on peut le faire. A nouveau il faut être prêt à nčimporte quoi et ne pas attendre une réponse claire, mais plutôt une «aventure» démonstrative. Quand on ne comprend pas ce qui se passe, on peut toujours le dire et demander des explications. (Mes «guides» me les donnent en général, avec une sorte de patience excédée qui peut être très amusante.)
ł Quelquefois, le fait dčavoir posé la question provoque une sorte de vide. Le mieux, en ce cas, est de se mettre en mouvement, de faire nčimporte quoi dans le R.E. Il semble que le déplacement spatial soit important. Pour moi, cčest en général le «guide» qui en prend lčinitiative, mais il arrive aussi que je bouge pour mettre les choses en marche.
ł Lorsque lčenchaînement du RE sčétablit par le mouvement (qui peut être aussi une activité physique «non ambulatoire») on se laisse porter. De temps à autre, il y a des sortes dčobscurcissements de lčhistoire ou du déroulement. Je me suis aperçu qučil était bon de les considérer comme des «seuils» où lčon traverse une brève période de vague et dčobscurité pour trouver la suite de lčautre côté. Souvent, ces passages correspondent à un changement de lieu ou un changement de plan. Sčils se prolongent, on peut reprendre le «discours» du début en se décrivant à soi-même ce qui se passe, ou bien on peut dire au guide «ça reste vague, où est la suite ?» ce qui en général a pour effet de la faire paraître.
ł Lčimportant est de ne pas tenir absolument à la logique. Les passages obscurs interviennent souvent au bout dčune séquence où les choses se sont enchaînées un peu trop logiquement, où elles ont pris la forme dčune histoire trop bien structurée. Quand on arrive à dépasser ces moments, il arrive souvent qučon soit grandement étonné par ce qui se passe ensuite. Ceci est excellent, très stimulant pour le R.E. ; il ne faut surtout pas sčarrêter pour se dire son propre étonnement, mais continuer avec curiosité de connaître la suite.
ł Parfois, des changements de plan de conscience interviennent. On revient à soi-même, couché dans son lit. Il faut intégrer aussitôt ces moments-là comme des épisodes nécessaires du R.E. - ce qučils sont en vérité. Ou bien on passe dans des états qui semblent nčavoir plus rien à voir avec le rêve, et qui paraissent lčannuler complètement. Ces états-là sont parfois ce qučil sčagissait dčatteindre, mais on ne le sait pas, au premier abord. On sčen aperçoit lorsqučon essaie de continuer le rêve et qučil nčévolue plus. On peut alors demander au «guide» ou à soi-même si cčest fini. Pour moi, lorsque cčest «oui», la réponse est souvent un retour de lčétat en question auquel je me laisse aller, alors, sans chercher à continuer le rêve.
ł Dans le déroulement dčun R.E., il peut arriver qučil se présente des événements ou des «personnages» effrayants ou désagréables. Il me semble que ces moments-là sont importants. Si on cède à la crainte, on perd une partie particulièrement révélatrice du «message». Je pense que la façon de faire face dépend beaucoup de la nature du rêveur. On pourra combattre, ou se laisser faire, ou discuter, ou chercher une solution différente, mais lčimportant est de ne pas interrompre le rêve sous prétexte que cčest effrayant. (Je dis ceci sous toutes réserves. Il se peut que certains évoquent des choses parfaitement insupportables. Il me semble que, dans ce cas, la solution serait de demander de lčaide au «guide». Pour moi, je me débrouille généralement tout seul et je demande ensuite au guide si jčai bien fait.)
ł Certains de mes RE se ferment sur eux-mêmes. Ils ont une «fin» esthétiquement satisfaisante, mais ce nčest pas toujours le cas. Dčautres se perdent dans le vague et cessent de mčintéresser. Par contre, jčai remarqué que si je mčendors en cours de RE il arrive souvent qučil ait une suite fort intéressante dans un rêve de sommeil. Č
(Sujet n°10, janvier 1986)
Dans lčensemble, le meilleur moyen de bien pratiquer le rêve éveillé est de commencer, même si au début les résultats semblent très éloignés de ce qui est attendu. Aussi ne vous attendez pas à vous retrouver tout de suite dans un rêve éveillé dont les images auraient une qualité perceptive proche de lčétat de veille. Cela nčest pas nécessaire pour la bonne application des consignes qui suivent.

I. Consignes à respecter quotidiennement
Étape 1
Une fois couché, lorsque vous êtes prêt à dormir, pratiquez une relaxation au terme de laquelle vous commencerez un rêve éveillé. Il sčagit de se laisser porter par une histoire qui se développe dčelle-même ; il ne faut donc pas confondre le RE avec une rêverie où le sujet construit plus ou moins lčhistoire. Pour ceux qui nčont pas lčhabitude du rêve éveillé, les résultats seront sans doute flous au début. Cela est sans importance. Le rêve éveillé est une fonction normale du cerveau et non une habileté que lčon développe par lčapprentissage. Persévérez pendant quelques jours pour ł dérouiller Č cette fonction.
Étape 2
Au cours du rêve éveillé, soyez à lčaffût des éléments de type oniriques. Reconnaissez-les comme tels, au besoin en vous disant mentalement : ł cela (ce décor, cet objet, cette action, etc.) est du domaine du rêve. (Mais nčinsistez pas au point de ralentir, voire de dissiper, le rêve éveillé.) Si vous pouvez descendre profondément dans le rêve éveillé (cčest-à-dire perdre contact, ou presque, avec les sensations de lčétat de veille) faites de la recherche des éléments oniriques le thème du RE, cčest-à-dire votre objectif. Il est bon de décider de ce thème avant de sčallonger, pour ne pas perdre le fil.
Étape 3
Lorsque le sommeil vous gagne, le rêve éveillé a tendance à disparaître ou à se reconstituer par à-coups. Efforcez-vous de le maintenir sans pour autant que cet effort ne vous réveille, auquel cas vous pouvez toujours reprendre la relaxation et recommencer le cycle.
Étape 4
Deux cas peuvent ensuite se présenter :
- des images hypnagogiques surgissent qui cassent le rêve éveillé : entrez dedans consciemment dans la mesure du possible ;
- le rêve éveillé lui-même se transforme en images hypnagogiques : laissez-vous alors porter, toujours consciemment.
Étape 5
Si vous vous réveillez en cours de nuit recommencez le cycle. Cčest après quelques heures de sommeil que cette induction donne ses meilleurs résultats. Le week-end peut être un moment favorable pour cette expérience lorsque lčon dispose dčune heure ou deux de plus pour dormir.
Étape 6
Quand vous noterez vos rêves, pensez à inclure le récit de vos rêves éveillés dans votre journal.

II. UTILISATION DU Tableau récapitulatif
Ici aussi, le tableau récapitulatif qui se trouve en fin de cours peut vous aider à prendre conscience de la continuité (ou du manque de continuité) de vos efforts. Collez-le dans votre journal de rêve et remplissez le quotidiennement.
Dans la colonne «exercices conscientiels» indiquez si vous avez pratiqués tant soit peu dans la journée les exercices dčattention décrits à lčoccasion de la méthode précédente. La capacité à «oublier» ces exercices est étonnante, et il faut ici faire preuve de vigilance.
Colonne «coucher» : Si vous avez pratiqué un autre type dčexercice avant la relaxation, tel que les phosphènes, précisez le type dčexercice et le nombre de minutes (même inférieur à 45).
Dans la colonne relaxation, précisez le type de relaxation, surtout si vous en pratiquez plusieurs. Il pourrait sčavérer par la suite que certaines soient plus porteuses que dčautres, pour vous, de lucidité.
La rubrique REVE ÉVEILLÉ comporte deux colonnes auxquelles il convient également de répondre en indiquant la qualité du RE obtenu : très profond (qualité des images, pas de contact avec les sensations physiques de veille), profond (bonne qualité, mais sensations physiques de veille), superficiel (images floues, éventuellement dispersion mentale) ?
4. Dans la rubrique REVES OBTENUS indiquez le nombre de rêves lucides ou de rêves associés au rêve lucide obtenus. Ne vous contentez pas dčune croix. Si des phénomènes particuliers, tel que, par exemple, lčabsence totale de souvenir de rêves, se présentent, signalez-les brièvement et donnez-en une description plus complète dans votre journal de rêves.



ANNEXE : SUR QUELQUES FORMES DU REVE DE VOL

Le rapide aperçu qui suit nčest destiné qučà guider la relecture de votre journal de rêves de façon indicative ; vos expériences de vol onirique prendront probablement des formes qui ne sont pas répertoriées ici et qui sont classées comme suit :

1) Quelques formes du rêve de vol

2) Rêves corrélés au vol

3) Le vol non réalisé
Lčintention de voler
Où il est question du vol

Quelques formes de rêves de vol

Le vol autonome, celui au cours duquel le rêveur défie la gravité par ses propres moyens, est sans doute le type de rêve qui a donné son nom au phénomène. Cependant lčexamen des journaux de rêves montre que nombreux sont les sujets qui considèrent comme «rêves de vol» ceux au cours desquels ils se déplacent dans lčespace à lčaide dčun appareil volant. On pourrait être tenté de voir là une erreur catégorielle et considérer qučil sčagit de deux types de rêves différents. Toutefois une telle attitude rendrait impossible à classer les rêves de type intermédiaire : par exemple, le vol à lčaide dčune fusée dorsale où le rêveur a bien le sentiment de se déplacer par lui-même ; ou encore le vol à lčaide dčune paire dčailes où la distinction entre lčappareil et ł lčorganisme Č devient délicate. Le vol «à lčaide dčun appareil» doit donc être considéré, tout autant que le vol autonome, comme un rêve de vol à part entière.

Le vol autonome
Les journaux de rêves attestent lčexistence de deux catégories de vol autonome, le vol à lčair libre (cčest-à-dire sans restriction spatiale) et le vol dans un espace clos dont la taille peut varier mais dont lčaspect «fermé» joue un rôle déterminant pour les modalités du vol. Dans chacune de ces catégories on peut distinguer les rêves dčenvol (qui comprennent le moment où le rêveur quitte le sol) de ceux où le vol est pris en cours. Le vol par saut entre sans doute dans les rêves dčenvol, mais son occurrence est suffisamment importante pour mériter une rubrique spéciale.

Le vol à lčair libre
Envol
Rêve n13
Rêve associé - Vol :
Cela commence dans la cour dčune maison de campagne qui se trouve en haut dčune longue pente boisée. ChŠ D. se trouve là. Je flotte à quelques centimètres de terre, assis, les jambes dépliées en avant. Je dépasse ChŠ sans le regarder, en songeant à son étonnement sčil remarque ma façon de progresser. Mais ensuite, je passe le bord du plateau et jčoublie tout dans le plaisir du vol glissé au ras de la cime des arbres. Cčest un tout petit peu vertigineux quand il faut dévier pour passer par-dessus un arbre plus élevé, car on risque alors dčêtre projeté dans le ciel, mais ça fait partie du plaisir.
Jčatterris sur un chemin forestier où je vais passer la nuit. A lčaube il fait très frais. Sur le bord du chemin, un buisson cylindrique fume abondamment. Cčest une façon de faire du feu sans provoquer dčincendie. DŠ C. est avec moi, ainsi que deux filles inconnues (de moi, lčune est lčamie de DŠ) ; nous entourons ce buisson de nos bras pour nous réchauffer. Nous sommes un peu clochards, y compris les filles qui sont habillées en hommes avec des vêtements informes.
Nous arrivons près dčune sorte dčentrepôt ou dčusine - en tout cas un très grand bâtiment de béton sans étage. Lčentrée est fermée par une porte de tôle, mais on peut grimper par-dessus le mur. Je le fais, ou plutôt je fais semblant de grimper. En réalité, je vole, mais il ne faut pas que mes compagnons sčen aperçoivent. [Š]
(Sujet n°10, Clochard volant, extrait, 5 octobre 1986)

Vol par saut
Rêve 14
(Š) Je prends conscience de sauter par ma fenêtre (6e étage). Lucidité. Je retombe lentement et rebondit sur la tête dčun passant et continue de tête en tête. Après quelques têtes, je rebondit sur celle de ma grand-mère (qui habite fort loin) et prend conscience que mes bonds peuvent gêner les passants. Je décolle et arrive rapidement très très loin. Il nčy a plus de sol ni dčhorizon. Jčarrive au bout dčun court instant (très très haut) à lčentrée dčune grande cathédrale ouverte. Je vole jusque sous la nef et monte encore ; je me demande ce que pourrais bien faire ici. A ce moment jčentends une voix forte et puissante sortie de nulle part mčordonner : łTu nčas rien à faire ici. Va-t-en.Č Je me retrouve dans mon lit. Lever.
[Sujet n°44, Paris, 1992]

Vol en cours
Rêve 15
Nu, je vole à lčhorizontale le long de la passerelle face au musée dčOrsay. Je rencontre deux amies. Je [Š] passe devant elles pour continuer mon chemin. Toujours nu, jčavance dčun pas élastique et hyperléger sur la chaussée, longeant la rive gauche, vers lčAcadémie. Dčun bond de gazelle, je saute par-dessus les voitures stationnées et atterris sur le trottoir. Encore une fois, je me demande ce que vont penser les passants que je croise. Mais ils ne me regardent même pas. Jčen conclus que tant que je serais bien dans ma peau, aux yeux des autres, je serais tout à fait normal tout en prenant plaisir, comme en ce moment, à ressentir la souplesse et la participation de chaque muscle de mon corps dans mes gestes, comme une machine bien huilée, un athlète, un champion de course à pied. Et je cours, souple, aérien et nu. Était-ce un voyage astral ?
[Sujet n°14, mi-novembre 1990, extrait]

Vol dans un espace fermé
Envol
Rêve 16
[Š] Je suis dans une maison familiale, entouré de cousins et de cousines. Il y a une sorte de fête ou de célébration. Il reste peu de détails, à lčexception dčune scène de vol assez longue et intense. En dessous de la maison, et joint à elle par un large escalier, se trouve une sorte de cave-chapelle. Je mčy rends sans toucher les marches, en volant. Puis je fais quelques décollages verticaux dans la chapelle elle-même. Il y a ensuite une discussion au sujet du vol avec de jeunes membres de ma famille. Nous comparons nos méthodes, avec démonstrations. Il y a le vol type «fusée» et le vol type «rase-mottes». Jčavoue que je pratique plus souvent ce dernier.
[Sujet n°10, Le vol en famille, extrait, 25 janvier 1986]

Vol au moyen dčun appareil
Dans la catégorie des vol «au moyen dčun appareil, il semble qučil faille faire la distinction entre lčappareil conçu pour le vol (par exemple un hélicoptère) et celui qui ne lčest pas (par exemple un tapis). Dans le premier cas, en effet, on peut considérer que le rêveur se «laisse porter», tandis que dans le deuxième son intention de voler est déterminante. Les variations de vitesse des différents vols sont elles-mêmes remarquables et mériteraient dčêtre étudiées.

Appareil volant
Appareil très rapide (fusée)
Rêve 17
[Š] Je suis le cinquième homme (pas prévu au programme) à partir dans une capsule spatiale. Décollage, je me sens écrasé.
[Sujet n° 8, Mardi 24 janvier 1989, extrait]

Appareil rapide (du type avion)
Rêve 18
Très joli rêve surtout visuel, coloré et détaillé. On survole dans un petit avion le coin dčAlsace que je connais bien. Je parle des vignobles et du vin. Nous sommes au-dessus du vallon de Tierebach, cčest lčautomne, on aperçoit des coteaux couverts de vignes dont les feuilles ont pris des couleurs vives. Puis on passe le petit col du Binstoeckk, au ras de la cime des arbres. Je suis tout attendri, car nous allons voir la ville de Guebwiller. Je voudrais commenter pour mes compagnons, mais tout passe trop vite. Au moment où je leur parle des Cordeliers, on voit déjà lčéglise Notre-Dame. Lčavion vole à quelques mètres au-dessus du sol dans la grande rue. Je parviens tout de même à présenter «Saint-Léger, joyau de lčart roman» que je trouve un peu noirci par rapport à mon souvenir, puis nous sommes dans la campagne, au-delà de la ville. Nous cherchons un endroit pour nous poser, mais le terrain est plutôt collineux et les routes tortueuses. Finalement le pilote choisit un champ de jeunes betteraves qui sont hachées par son train dčatterrissage [Š].
[Sujet n°10, Le survol de Guebwiller, extrait, 27 janvier 1986]

Appareil normalement non destiné au vol
Rêve 19
[Š] Le deuxième épisode débute près de la ferme (très anglaise, elle aussi). Mon cousin a un petit camion où il range son matériel. Sur les côtés de ce camion, il y a des sortes de tiroirs. Certains contiennent des outils, dčautres des matières premières, dont certains tubes en plastique remplis de produits chimiques.
Je lui fais remarquer qučen mélangeant ceci et cela on obtient de lčhydrogène. Lčidée lui plaît. «Si on remplissait un matelas pneumatique!» Nous le faisons. Il flotte très bien.
Avant dčutiliser le matelas, je vais dčabord faire un essai sans, pour voir comment est le vent. Je mčélève le long de la façade de la maison. Quand je vole ainsi, je contrôle parfaitement, mais la question est de savoir à quoi je me raccrocherai quand je serai sur le matelas. Je saisis au passage des gouttières, une plante grimpante, et finalement, avec inquiétude, des fils électriques, mais mon cousin me crie dčen bas qučil nčy a rien à craindre tant que je nčen touche qučun seul à la fois.
Bon. Ça va. Je monte sur le matelas pneumatique. On le lâche. Mais il est dévié par un coup de vent et je manque tous les points dčaccrochage que jčai prévus. Me voilà parti dans le ciel.
Je ne suis pas très inquiet, sauf que si je monte trop haut, il commencera à faire froid. Je prends une épingle et fais un petit trou. Le matelas se dégonflera donc progressivement et je pourrai descendre sans heurts.
Cčest ce qui arrive, mais je vais tomber dans un étang dont lčeau est du plus beau vert. Le matelas coule tout de suite. Curieusement, je me vois moi-même dčen haut, debout sur la surface de lčeau. Je peux faire cela, mais je ne peux pas marcher. Donc je me décide à nager. Je mčenfonce et nage la brasse jusqučà la rive.
Sans transition, je suis dans une salle de bains où une jeune femme est en train de laver sa petite fille. Jčattends mon tour pour me laver de lčeau verte de lčétang. Je sais que je suis dans la maison du début du rêve et cela me paraît normal.
[Sujet n°10, La maison anglaise et les Scotties suivi de Vol en matelas pneumatique, 6 janvier 1986]

Rêves corrélés au vol
Lčexamen des journaux de rêves montre ce qučune conception a priori du rêve de vol ne permet pas de mettre en évidence, à savoir qučil existe des rêves qui lui sont corrélés de façon essentielle. Ces rêves apparaissent souvent dans la proximité temporelle des rêves de vol proprement dit, qučils se présentent comme des variantes du vol, ou qučils en engage la représentation.

Les variantes du vol
Les «variantes» du vol ne sont pas des «formes» du vol mais des substituts. Le vol onirique peut en effet être décomposé en une série de caractéristiques dont chacune prise séparément, ou en petits groupes, peut donner lieu à ce dernier type de rêves. Bien qučil ne sčagisse pas là de vol à proprement parler, il est difficile de ne pas tenir compte de ces caractéristiques qui placent les rêves où elles apparaissent dans une catégorie que les rêveurs situent spontanément à part. Ces traits particuliers peuvent être empruntés au vol lui-même (vitesse, légèreté, montée) ou encore le rêve peut ressembler au vol onirique tout en se situant dans un contexte différent (plongée, chuteŠ). La plupart du temps ce sont les remarques des rêveurs eux-mêmes (non incluses ici) qui indiquent (et affirment) ce rapport.

Les éléments constitutifs du vol
Vitesse
Rêve 20
Au réveil me restent les bribes dčun rêve. Il est dčabord question dčune course automobile autour dčun lac. Vitesse. Souplesse de la conduite. Je suis à la fois un conducteur (homme) et la passagère éblouie. Et je deviens celle qui discute avec lčorganisatrice. Séquence très agréable. [Š]
[Sujet n° 4, Fête chez PMA, extrait, 17 novembre 1991]

Légèreté
Rêve 21
Rêvé que JŠ était rentré dans ma chambre, il parlait très fort et en anglais. Je gardais les yeux fermés car cela mčagaçait beaucoup. Lorsque je fus obligée de lui demander de se taire, jčai ouvert les yeux. La chambre était dans lčobscurité. Je me décidai donc à traverser les murs pour le réveiller. Je me sentais très légère et jčallais de chambre en chambre. Je le trouvai enfin et touchai sa main pour le réveiller puis je retournai dans ma chambre. Au début jčavais lčimpression dčêtre figée puis jčai commencé à partir.
[Sujet n°7, 24 décembre 1991]

Montée et descente
Rêve 22
[Š] La suite est dans un hôtel à Grenoble. Je suis homme de ménage de lčhôtel. Je dois, au milieu de la nuit, aller faire une chambre au rez-de-chaussée, alors que je loge, avec mes collègues, sous les combles. Je descends par lčascenseur (cčest très long). Arrivé en bas, je mčaperçois que jčai oublié les clefs de la chambre, je presse sur le bouton (cčest en fait une espèce de membrane souple) pour remonter aussitôt. Notre chambre est le 5. Jčentre sans allumer dans cette pièce pleine de gens qui dorment et trouve aussitôt le trousseau de clés. Je ressors sur le palier. Christian est là, attendant lčascenseur. Nous descendons ensemble.
[Sujet n°10, Lčinfirmière à la balayette - Lčascenseur de lčhôtel, extrait, 5 décembre 1985]

Vol par ressemblance
Analogie de mouvement
Mouvement volontaire
- Plongée
Rêve 23
Je me retrouve en stage ou rencontre dčorthodoxes dans un village. Avec PŠ et HŠ. Il y a là plusieurs chantres. Je me déplace de façon récurrente dans tous les lieux de ce village : la place, la rue parallèle à la place, avec pour chacune un blason à devises gravé dans le sol (oublié les devises), la maison où se déroule le stage, avec sa grande entrée voûtée et sonore, enfin le bord des deux ruisseaux, qui sont canalisés, avec des sortes dčescaliers à écluse, en pierre de taille. Au bout de quelques parcours, je retrouve X, une choriste, musicienne + deux autres musiciennes. Nous parlons composition. La brunette, très jeune, nous dit qučelle va se remettre à composer. Une autre qui ressemble à FŠ GŠ (note pour C.B. : dans le réel, prof de musique) approuve et parle aussi de noter les airs entendus comme ça. Jčai moi-même composé mais oralement, en chantant (dans le rêve), car jčai du mal à transcrire et je me demande si lčune des deux ne pourrait pas transcrire au vol mes impros. Nous décidons en tout cas de travailler le chant sur partition cet après-midi. A la question : que vas-tu faire ? Je réponds : prendre mes partitions et travailler le chant. Je vais les chercher. Au passage, dans la salle voûtée, je vois PŠ et HŠ qui me reposent la même question, mais quand je réponds, me font taire : «Chut chut, pas si fort, ça résonne et il y a des gens qui travaillent». Mon énergie sauvagement coupée râle. Je me retrouve, toujours préoccupée de ces partitions, devant le ruisseau aux eaux noires : il y a comme deux marches dčun escalier dčeau, qui descend, et ensuite lčeau est profonde et noire. Jčai envie de mčy plonger, mais HŠ est avec moi et je renonce à ce désir [Š Notes pour C.B. : Ce détail fait de ce rêve un rêve associé, car la plongée dans lčeau est pour moi lčéquivalent du rêve de vol, souvent générateur de lucidité : ma décision, gênée par une présence, de ne pas plonger équivaut à un refus de lucidité]. Je sens sa présence raisonnable et castratrice. Elle ne comprendrait pas, alerterait ciel et terre, et cela me fatigue dčavance [Š].
Autre séquence, après ou avant : je marche dans un autre ruisseau pour ramasser des morceaux de bois arrondis pour me masser les pieds, mais il est à sec, lčeau sčest transformée en une pellicule de boue. [Š]
[Sujet n° 4, Le village de stage, extrait, 8 août 1991]

-Saut
Rêve 24
Je suis dans mon ancien bureau. Jčessaie de travailler mais nčy arrive vraiment pas. Mon collègue mčapprend des choses bien déprimantes sur la marche de lčaffaire. On ne voit vraiment pas comment ils vont continuer. La feuille de papier que jčai mise dans la machine se froisse et se déchire. Je renonce. Je sors dans la rue. Cčest la rue de Rennes. Il nčy a plus de passages cloutés, mais des espèces de chevaux pour voitures séparés par des murets de ciment continus. En sautant dčun muret à lčautre, jčarrive tout de même à passer. [Š]
[Sujet n°10, Le café en sucre glace, extrait, 11 janvier 1986]

Mouvement subi
- Chute
Rêve 25
Ça se passe dans un parc national ou une réserve en Amérique. Il y a eu dčautres épisodes avant celui-ci, le seul qui est resté. Je suis avec EŠ et plus ou moins vêtu en trappeur de lčancien temps. Je lui promets de lui faire voir des ours. Nous montons sur une montagne complètement artificielle- elle est en plastique blanc avec des membrures ou des renforts visibles par transparence. Il faut imiter le grognement dčun ourson et lčon verra apparaître les ours par un «col» qui se trouve au-dessous de nous. En fait, subitement, une ourse se montre au-dessus de nous, sur une sorte de glacier artificiel. Il y a danger. Je casse le plastique de la montagne. A lčintérieur il y a un mur vertical sur lequel je trouve un grand tableau. Plusieurs personnes sont déjà debout sur le cadre de ce tableau, se serrant contre le mur. Je dis à E. de sčy réfugier aussi. Il était temps, car lčourse arrive en rugissant.
Je me laisse tomber dans une sorte de large tuyau intérieur à la montagne, en même temps qučune foule dčautres animaux, cerfs, caribous et bisons. Lčourse est derrière nous. Le troupeau sort au bas de la montagne artificielle et galope dans une allée menant aux portes de la réserve. Je les ouvre et mčefface pour les laisser passer. Tout le troupeau, puis un groupe dčours assez nombreux, sčy engage. Je ferme le portail derrière eux.
Cčest alors que jčaperçois un jeune bison qui nčest pas sorti avec les autres et les regarde fuir, par-dessus la haie. Quand il me voit, il se retourne et caracole un peu. Ses cornes me paraissent bien pointues. Mais finalement il est amical et me permet de monter sur son dos. Cčest ainsi que je reviens triomphalement vers la montagne en plastique, ayant délivré mes compagnons en danger des ours.
[Sujet n°10, 1. Les ours, 23 janvier 1986]
- Aspiré
Rêve 26
[Š] Un homme, jeune et blond, me propose de monter à bord de sa décapotable blanche (ou rouge ?). Je comprends qučil me propose son amitié et me dis qučil ne faut pas se tenir toujours sur ses gardes. Mais, chaque fois que je cède à lčenvie dčaccepter son amitié, je perds tout contrôle sur moi, me sens aspiré vers la voiture, ressens comme un attrait physique pour lčhomme. Pris de panique, je refuse son amitié pour mettre fin à cette situation hors contrôle. Je sais que cet homme est le diable, mais je nčassocie pas cette notion de diable au mal mais à un sentiment de déstabilisation, de perte de contrôle de soi. A plusieurs reprises, je reprends de lčassurance et me laisse tenter par cette amitié. Chaque fois, je me sens aspiré et paniqué, et je stoppe net. Le diable et sa voiture disparaissent et je suis bien triste de nčavoir pas osé me lier dčamitié avec cet inconnu. Jčerre le long dčune voie ferrée dans un paysage désolé. Jčentends la voix du diable qui mčappelle bien qučinvisible. Encore une fois, je me laisse tenter et aspirer, mais, là, vers le néant. A nouveau affolé, je mets fin à la situation. [Š]
[Sujet n°14, début octobre 1990, extrait]

- Glissade
Rêve 27
[Š] je sors, il pleut, il y a une route qui descend, bordée dčarbres - mais je préfère prendre un chemin qui longe la route. Je marche sur le chemin- en contrebas à droite je vois des gens qui pique-niquent sous des arbres abrités de la pluie, un homme avec une hache, un emplacement dčherbe brûlée. Le chemin arrive à un abrupt, je ne sais comment continuer. Je décide de revenir sur la route- mais la route est, en contrebas, inaccessible. Faut-il rebrousser chemin ? Je mčassois pour réfléchir. Je remarque que lčherbe est piétinée, donc on doit pouvoir descendre. Là-dessus arrive un couple un peu âgé. Lčhomme dit que lčon peut descendre. Il sčengage, suivi de sa femme qui perd lčéquilibre, tombe sur son postérieur et glisse. A ce moment, cčest moi qui ait une forte sensation de glissade. Un fou rire me prend et je décide de descendre en me laissant glisser. Une autre jeune femme arrive et sčassoit derrière moi, prête à la glissade. Mais la mémé devant ne bouge plus et bouche le passage!
[Sujet n°13, Glissade et fou rire, extrait, jeudi 31 juillet, Paris, 1er réveil à 3h]

Analogie par le milieu
Rêve 28
[Š] Un groupe de jeunes filles assises à des pupitres dčune salle de classe. Je les quitte en promettant de leur envoyer un bouquet de fleurs. Je me retrouve à la plage entouré de membres de ma famille et dčamis. Les voitures, dont une 504 blanche, sont garées sur la route qui longe la mer. Je distingue dans le groupe des femmes de la famille en sari, mes neveux, dont un qui promet de ne pas sčapprocher seul de lčeau tout en y fonçant tête baissée et que je rattrape et corrige avec affection, des cousins et dčautres personnes que je nčai jamais rencontrées mais dont je sais qučelles sont des amis ou des parents éloignés. Je suis au bord de lčeau. Couché sur le dos, je glisse , avec délice, dans lčeau comme dans une piscine, les yeux grand ouverts. Lčami qui se trouve près de moi, et que je vois à travers lčeau claire, mča lčair sceptique. Je mčapprête à respirer un grand coup sous lčeau, quand je me rappelle que cčest lčair qučon respire. Je sors la tête tout en pensant que je suis si bien dans lčeau que je devrais probablement pouvoir y respirer, regrettant un peu de ne pas oser mčy essayer. Nous nous éloignons du bord. Une grosse vague nous surprend. Mon ami regarde la plage en suffoquant, puis sčy dirige un peu effaré bien qučil ait encore pied à cet endroit. Moi, je plonge sous la vague et me laisse porté jusqučau rivage. La vague est forte, mais jčatterris sur le sable comme dans du coton, glisse sur quelques mètres, et me trouve couché par terre au beau milieu du groupe familial. [Š]
[Sujet n°14, extrait, janvier 1990]

Le vol non réalisé
Un rêve peut être corrélé au vol en lčabsence de toute «variante». Ainsi la simple intention de voler généralement présente dans les rêves dčenvol, ou encore le thème du vol, même lorsqučaucun vol nčest manifeste, sont liés aux rêves de vol par proximité onirique ou par les remarques des rêveurs. Cette présence thématique est encore plus nette lorsque le vol est reporté sur des objets ou des personnages que le rêveur regarde évoluer.

Lčintention de voler, plonger, sauterŠ
Rêve 29
Soleil. Ville, mais en même temps campagne, en pente. Lyon dans le rêve (rien à voir avec le vrai Lyon). Je marche avec un groupe, dont lčévêque. Ambiance détendue. Nous montons sur des routes, croisement en épingle à cheveux. Je vois, au sommet de cette ville, un double plongeoir, très haut, dčoù sčélancent perpétuellement des baigneurs. Jčaperçois un instant une piscine à lčeau couleur de turquoise claire ou plutôt dčémeraude claire. Un bref instant je me trouve moi-même, par une translation de lčêtre, sur le plongeoir le plus haut. Et la raison sčen-mêle, en un comme en deux mots : tu ne sais pas plonger, tu risques un à-plat, cčest de la folieŠ etc. Raisons auxquelles jčacquiesce - pour me retrouver à bavarder vainement avec lčévêque sur ces routes sans intérêt en regardant les êtres beaux qui osent plonger, qui savent plongerŠ
[Sujet n° 4, Plongeoirs, 6 décembre 1991]

Où il est question du vol
Rêve 30
[Š] Je me suis trouvé dans une grande maison comportant de nombreux débarras et greniers, où les gens pouvaient venir rêver. Cčétait à la campagne et nous avions un «stagiaire» hors du commun, mais qui nous posait des problèmes. Il ressemblait passablement à J.-P.SŠ, mais de plus cčétait un Noir américain. Les problèmes qučil nous posait étaient ceux-ci : dčune part il buvait et ne rêvait qučen étant ivre, dčautre part il nous impliquait profondément dans ses rêves, avec une chaleur, un côté «tout cŠur», dont nous nčavions pas lčhabitude.
Je racontais cela à dčautres, en restant vigilant vis-à-vis dčun autre stagiaire Noir qui aurait pu sčimaginer qučil y avait du racisme dans mes paroles. En fait, ce type, grand, mince et plutôt «cérébro-tonique» voyait mes précautions avec amusement, car tout racisme avait cessé de le toucher depuis longtemps.
Plus tard, jčétais à nouveau en train dčexpliquer le rêve à un couple de nouveaux venus. (Jčentends encore très bien ma propre voix.) Jčexpliquai que le vol physique nčest qučun signe - relativement négligeable - dčun autre état, tout intérieur. Je parlais aussi, avec affection, de notre stagiaire-problème. Je disais :
— Quand il sčest mis à pratiquer la psychosynthèse - oui, oui, je sais, ce terme est déjà utilisé par dčautres. Je lčemploie au sens de JŠ HŠ1 - donc quand il sčy est mis, il nous a dérouté en insistant pour se mettre tout nu, ce qui est assez habituel, mais étant donné sa grande sincérité naturelle, il sčest également mis à faire une cour assidue aux femmes. Nous nčavions évidemment pas le droit de lčen dissuader».
La femme du couple (elle est vêtue de rouge) reste neutre, mais il me semble qučelle est plutôt tentée. Lčhomme me pose des questions au sujet des «sons» ou de la musique.
Je lui explique qučon peut utiliser une musique enregistrée que lčon écoute avec des écouteurs, mais que la plupart des gens ne tardent pas à faire leur propre musique.
— Ils chantent ?
— Non. Cčest une musique qui vient autour dčeux quand ils sčenvolent. Quelquefois elle est très belle, mais ils nčy sont, en fait, pour rien. Cela provient de leur état.
Jčaurais bien continué, mais jčai rarement soutenu une lucidité aussi longtemps. Lčeffort pour ne pas sčéveiller commençait à faire des «trous» dans le rêve, et il fallait le reconstruire constamment.
NOTE 1- JŠ HŠ était ce Colonel des pompiers qui pratiquait un système de coïncidence rêve-réalité. Il lčappelait effectivement «psychosynthèse».
[Sujet n°10, Lčécole des rêves volants, extrait, 11 octobre 1986]


OBSERVATIONS POUR UNE MÉTHODE FLASH ÉVENTUELLE

Pour ceux qui ne trouveraient pas le temps de pratiquer les exercices mentionnés ici et souhaiteraient, en attendant, pratiquer une méthode flash, il est possible de ne concentrer ses efforts que sur quelques points précis :
1. Reprenez la méthode données par Florence Ghibellini dans la leçon 1.
2. Faites précéder votre rendormissement dčune séance de phosphènes de 3/4 dčheures, en vous concentrant sur un détail du phosphène, selon la technique donnée plus haut. Calculez lčheure de votre séance en conséquence.
3. Lors du rendormissement, concentrez la plus grande partie de votre attention sur votre respiration et gardez une place dans votre esprit à lčidée de maintenir votre conscience au cours de lčendormissement.
4. Acceptez tout ce qui se présente, du moment que vous en restez conscient.

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