Les gammes selon la méthode russe
(par Flo)

Les 4 éléments de base de la technique pianistique sont les gammes, arpèges, tierces, octaves. En général, les professeurs font faire des gammes, parfois des arpèges, pour le reste c’est généralement laissé en friche, et ça s’entend. Les tierces pas ensemble sont un défaut universel chez l’amateur (que quelques dizaines d’heures de pratique suffiraient à amoindrir audiblement), quant aux octaves, on n’en pleurera pas si on ne joue pas de Liszt, cela dit c’est loin d’être inutile.
La méthode russe propose une façon assez originale d’étudier ces 4 éléments : par 3, 5, 7, 9, 11, 13…
C’est-à-dire qu’on n’exécute pas une gamme d’un bout à l’autre, comme préconisé par certains professeurs, et qu’on ne fait pas non plus d’exercices à la Czerny - ces deux façons de faire étant seulement propres à s’assurer qu’on ne fera jamais une gamme correctement.
On décompose. Par 3, pour commencer. Ce qui donne ceci (en do majeur) :

Ici, je n’ai mis qu’un octave, mais il en faut au moins deux, pour travailler le passage du pouce sous l’annulaire, et personnellement je le travaille sur 4 octaves, afin de ne pas avoir de surprises sur le haut et le bas du clavier (où la position change un peu). Comme on le notera, à hauteur du dernier « do », on ne joue pas le ré qui suit, mais on s’en sert comme « miroir » et on rejoue un si à la place du ré. Ce qui permet de bien travailler les doigts 4 et 5. De même, en bas, au s’arrête au « do ».
Bien entendu, il faut essayer d’être « léger », et « égal ».
Sur la partition, je n’ai pas noté les silences parce que le logiciel m’a rendue folle, mais la mesure est exacte. Entre le premier et le dernier « do », il y a toujours le même temps (il manque donc ¾ + 1 temps dans chaque mesure. On utilisera ce temps mais laisser la main reposer sur la clavier, totalement relaxée, et on ne bougera pas avant la mesure suivante, afin de couper toute anticipation (et donc toute tension superflue). De plus, avec tous les doigtés du type 1 3 2 ou 1 4 2 (là on est dans un mouvement descendant), on essaiera de ressortir le pouce au moment où le 2 joue, ceci afin d’enlever toute tension résiduelle du pouce.
Quand on est capable de faire la gamme par 3 avec une vélocité respectable pour chaque groupe de 9 notes, on fait la même chose, mais par 5, en s’arrêtant aux « do » du haut et du bas comme on le faisait avec 3.
Quand le 5 est correct, on passe à 7, puis 9, puis 11, puis 13… A 13, on peut estimer que c’est OK.
Maintenant, on pourrait se demander, pourquoi pas 2, 3, 4, 5, 6 etc…
C’est une question d’équilibre. En fait, le 3 est la « cellule » minimale, et le travail s’équilibre autour du doigt central, en coupant les tensions possibles de chaque côté de la cellule. Je m’explique. Si par exemple on joue 2 3 1 3 2 3 1 3 2 (ré mi fa mi ré mi fa mi ré), sachant qu’on n’aura à jouer ni le « do » ni le « sol » : 1) au moment où on redescendra sur le « ré », aucune tension dans le pouce n’apparaîtra 2) au moment où on montera sur le « fa », aucune tension dans le majeur n’apparaîtra, puisqu’on ne jouera pas le « sol ». Cela coupe toute anticipation, et crée une automatisme anti-tension. En effet, à chaque note jouée, on aura une tension résiduelle du doigt précédent, et une tension anticipative du doigt suivant, mais ça n’ira pas plus loin. En fait, on apprendra à entretenir le minimum de tension. Et ce qui se passera, quand on jouera par 5, par exemple, c’est qu’il n’y aura pas de tension à 2 doigts d’écart. Par exemple, si on joue les doigts 1 2 3 4 5, au moment de jouer le 3, la tension dans le 1 disparaît automatiquement (puisqu’elle n’existait pas quand on le faisait par trois, le pouce n’ayant pas à jouer dans la série 2 3 4 3 2 3 4 3 2, où le 3 est la note centrale). De même, la tension dans le 5 n’apparaît pas encore, même s’il doit jouer dans 2/10èmes de seconde.
Bref, on est toujours très relaxe, il n’y a jamais de 2 ou 3 doigts qui jouent, tous les autres sont au repos. Ce qui leur permet d’être détendus quand leur tour arrive.
On précède évidemment de la même manière pour la main gauche, et on ne met pas les 2 mains ensemble tant qu’on n’est pas largement au point.
Et l’on procède de même pour toutes les autres gammes. Ré majeur, mi majeur, sol majeur etc… Enfin, autant qu’on a de temps à y consacrer… Si on ne peut en faire que deux, je conseillerais do majeur et la majeur.
(J’espère que vous avez compris quelque chose).

Exemple de travail par 3 sur 2 octaves

Exemple de travail par 5 sur 2 octaves